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Reviewed by:
  • La fabrication de l’auteurs ed. by Marie-Pier Luneau and Josée Vincent
  • Hugues Corriveau (bio)
La fabrication de l’auteurs, s. la dir. de Marie-Pier Luneau et Josée Vincent, Québec, Nota bene, 2010, 525 p., 33,95$

D’entrée de jeu, disons qu’il ne s’agit pas à proprement parler d’un essai collectif, mais plutôt d’une sorte de manuel répertoriant divers aspects de ce que serait un auteur, de ce qu’il porterait en lui d’incidences multiples. De ce point de vue, La fabrication de l’auteur est extrêmement utile pour qui s’intéresse à ce qui définit le créateur littéraire, pour qui cherche à le percevoir sous toutes ses facettes et contingences. On notera la citation vaguement polémique de Fernand Divoire, extraite de son Introduction à l’étude de la stratégie littéraire (1912), mise en exergue des études ici présentées :

Il est vraiment incompréhensible que la Stratégie littéraire ne soit enseignée nulle part, alors qu’il existe quantité de cours parfaitement inutiles aux littérateurs (latin, grec, langue française, grammaire, technique poétique, étude des prétendus bons auteurs, etc.), et que sont données dans certaines universités libres des leçons de lyrisme prosodique et de méthodique sincérité. À peine si dans deux ou trois cafés, inter scutellas, quelques aînés démonétisés consentent à donner aux débutants de vagues conseils destinés à les perdre.

Et les responsables de conclure leur présentation ainsi : « les lecteurs pourront [dans notre livre] trouver des réponses concernant la figure de l’auteur, les étapes et les éléments de sa fabrication. Ainsi le souhait de Fernand Divoire, cité en exergue, sera en partie comblé. »

Admettons d’emblée qu’il est pratiquement impossible de rendre justice à la publication des actes d’un colloque qui a eu lieu en 2006 et qui sont ici rassemblés. Trop hétérogènes, trop diversifiés pour former un tout cohérent, on ne peut que glaner des centres d’intérêt, des points de vue qui nous interpellent plus que d’autres. On se référera de préférence au texte de conclusion « Se dire écrivain » de Marie-Pier Luneau plutôt qu’au texte de présentation pour avoir une idée juste des enjeux qui sont débattus au fil des pages. Quoi qu’il en soit, on est happé par le plaisir d’entrer dans un monde qui ne nous est pas familier, par la fascination de suivre ces [End Page 749] penseurs qui interrogent le littéraire à partir de sa fabrique. On aurait sans doute aimé plus de ludisme, comme, de si belle mémoire, le livre remarquable de Francis Ponge, La fabrique du Pré, paru naguère aux Éditions Skira, nous en avait fait don. On y suivait les étapes et la venue au monde d’un grand texte, alors qu’ici, on nous fait voir la naissance d’une nomination ambiguë qui cherche à identifier une fonction à la fois individuelle et sociale.

Les essais retracent également les diverses étapes d’une appropriation titulaire qui va de l’intérieur créatif vers la relation de l’auteur avec les autres : lecteurs, critiques, éditeurs, héritiers, postérité … Les essayistes s’attardent forcément à la relation implicite du créateur à l’objet de création, à la matérialité du livre lui-même, lieu d’exposition et d’affirmation. Sans compter que l’identité de l’auteur est également formulée par le regard des autres, par l’exposition médiatique, par l’offre éditoriale.

L’éclairage, qui illumine de ses prismes les essais pertinents de La fabrication de l’auteur, ouvre à une meilleure compréhension des dimensions factuelles et symboliques du métier d’écriture.

Cette enquête est formidablement utile. Que des études se penchent sur les diverses interventions consécutives à un acte créateur jusqu’à en décortiquer et les étapes et les multiples interventions de sa mise à jour finale ne sauraient qu’enrichir le champ du savoir, comme on disait...

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