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Reviewed by:
  • Gabrielle Roy et l’art du roman
  • Daniel Laforest (bio)
Gabrielle Roy et l’art du roman, s. la dir. de Isabelle Daunais, Sophie Marcotte et François Ricard, Montréal, Boréal, Les cahiers Gabrielle Roy, 2010, 331 p., 29,95$

Gabrielle Roy et l’art du roman est un ouvrage collectif qui fait suite au colloque du même nom organisé par le Groupe de recherche sur Gabrielle Roy et le groupe « Travaux sur les arts du roman » à l’Université McGill en 2009, afin de souligner le centième anniversaire de la naissance de l’auteure. On serait tenté de dire que le livre marque un nouveau souffle dans les études académiques consacrées à la romancière. Mais on aurait tort. Parce que s’il est une chose que démontrent chacun des auteurs convoqués ici, à l’égal de l’ouvrage entier avec sa remarquable cohérence, c’est à quel point l’intérêt pour l’œuvre de Gabrielle Roy ne s’est jamais démenti depuis, comme le souligne François Ricard dans son texte d’ouverture, « les grandes études pionnières d’Alan Brown et de Hugo McPherson à la fin des années 1950 jusqu’aux lectures récentes de Lori Saint-Martin ou d’Alain Roy ». Avec Gabrielle Roy, nous sommes parvenus à ce point très rare pour les littératures mineures où les habituelles questions de littérarité et d’appartenance sociohistorique des textes, questions fréquemment employées comme des estampilles d’authenticité dans le cénacle des études littéraires, se trouvent ellesmêmes reléguées du côté de la tradition, de ce qui a eu un jour pleine raison d’être, mais plus maintenant. Gabrielle Roy discrédite les désirs trop impérieux de faire d’elle un simple objet littéraire (un symptôme, un exemplum, ou pis un historicisme) avec la façon déstabilisante dont son œuvre se tient dans la littérature. C’est ce qu’on voit d’abord ici : son œuvre nous parvient désormais accompagnée d’un héritage de lectures extrêmement diverses. Mais surtout, comme le montre Isabelle Daunais, il émane des livres eux-mêmes une opposition magnifique « entre l’action de raconter une vie et de celle de laisser à cette vie la possibilité de contredire le récit qui est fait d’elle ». Œuvre incontournable, dont c’est le destin heureux, la persévérance inentamée, et l’irréductibilité au sein des lettres qui acquièrent dans le présent ouvrage la forme, à vrai dire inattendue, d’un questionnement.

Questionnement à la forme inattendue, mais logique en regard de notre temps. Daunais, Marcotte et Ricard ne se demandent pas ce qui assure la pérennité de l’œuvre de Gabrielle Roy. Au contraire ; ayant pris acte de l’évidence transnationale de celle-ci, ils font le choix de l’aborder de front en quelque sorte, c’est-à-dire en dépassant ce que Milan Kundera a regroupé sous le nom de « petits contextes » et qui concerne, suivant Ricard, « les angles d’interprétation » possibles sur une œuvre. Ces angles dépendent d’allégeances disciplinaires ou théoriques. Plus souvent qu’autrement ils ne montrent, toujours selon Ricard, que ce « contre quoi [l’œuvre] s’est construite ». C’est donc pourquoi, en [End Page 426] définitive, Gabrielle Roy et l’art du roman se présente comme une recherche de la voie par laquelle une œuvre littéraire s’illimite. Avoir choisi d’identifier cette voie au roman n’est pas un hasard. L’histoire de ce genre est l’histoire d’une définition impossible, et par conséquent elle incarne le mouvement même au sein duquel on continue de s’interroger sur la littérature, sur son esthétique et sur la valeur de celle-ci quant aux images que l’on se fait de la vie. Que fait donc subir l’œuvre de Gabrielle Roy au roman ? Tous les auteurs convoqués ici n’ont pas manqué de poser cette question. La variété des approches produit un tableau d’une grande richesse. Si bien...

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