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  • Derrière les portes clauses : René Lévesque et l’exercice du pouvoir (1976–1985)
  • Olivier Côté (bio)
Martine Tremblay, Derrière les portes clauses : René Lévesque et l’exercice du pouvoir (1976–1985), Montréal, Québec Amérique, coll. Dossiers et documents, 2006, 710 p., 29,95$

Cet ouvrage est le fruit du travail exhaustif de Martine Tremblay, historienne de formation ayant œuvré comme chef de cabinet adjoint aux affaires gouvernementales (1981–1984), puis comme chef de cabinet (1984–1985) au sein du gouvernement de René Lévesque. Dans un style direct rarement lassant, elle se propose de reconstituer l’exercice du pouvoir de ce premier ministre (1976–1985) et l’économie politique de l’entourage politique et amical qui gravite autour de lui. À l’aune de la théorie sur les cultures organisationnelles de Michel Crozier et Érhard Friedberg (L’acteur et le système, Paris, Le Seuil, 1977), elle met en lumière les rapports de forces et les zones d’influence de cet entourage, perspective originale s’il en est dans l’historiographie québécoise où les biographies d’hommes et de femmes politiques possèdent souvent un cadre théorique plus conventionnel.

L’auteure s’inspire d’une variété de sources complémentaires : documents d’archives inédits ou sous-exploités en provenance de fonds publics et privés, articles de journaux d’époque, biographies sur René Lévesque – au premier chef, celles de Pierre Godin – et ouvrages d’histoire politique. Complémentairement, les 40 entrevues qu’elle a menées auprès d’anciens parlementaires, de ministres, de militants du Parti québécois et [End Page 489] d’amis de l’entourage immédiat de René Lévesque donnent vie à un récit qui aurait été autrement terne.

Dans la première partie, l’auteure s’intéresse, en tout premier lieu, à la personnalité de René Lévesque au gré des circonstances sociales de sa première année de pouvoir (1976) (chapitres I et II). Elle le qualifie de personnalité brouillonne, solitaire et belliqueuse vis-à-vis de son parti. Sur le plan idéologique, elle le présente comme un gauchiste pragmatique qui possède une éthique de la conviction. Dans un deuxième temps, elle fait le portrait de son entourage (partisans inconditionnels, stratèges, organisateurs, conseillers) et de la culture organisationnelle largement masculine du cabinet, faisant montre d’une connaissance intime des liens interpersonnels qui unissent l’entourage à un Lévesque intuitif et indépendant (chapitre III). Elle fait par ailleurs un portrait plutôt sombre de la vie au « bunker », un lieu qu’elle dit tourné vers l’intérieur (chapitre IV).

En deuxième partie, elle effectue le récit plus événementiel, en diachronie, des neuf années au pouvoir du Parti québécois de René Lévesque, qu’elle divise en deux périodes : la glorieuse période réformiste (1976–1980) et l’irrémédiable chute post-référendaire du Parti québécois (1980–1985). Elle jette un regard neuf, interne, sur l’accession du parti au pouvoir en 1976 et les différentes réformes sociales-démocrates qu’il met en place (chapitre V). Le récit de la bataille référendaire de 1979–1980 (chapitre VI) est très bien traité, si ce n’est dans sa description de la neutralité des journalistes politiques qui couvrent l’événement, neutralité que l’auteure considère comme préjudiciable au projet souverainiste. Par ailleurs, sa description des négociations ayant mené au rapatriement de la constitution canadienne (« La nuit des longs couteaux ») et sur le « rénérendum » (chapitre VII) a le mérite d’être bien contextualisée et exposée sans complaisance. L’auteure propose aussi une analyse lucide des causes de la faillite des négociations entre le gouvernement Lévesque et les syndicats de la fonction publique québécoise (chapitre VIII). Son récit du déroulement en quatre actes du « beau risque » de Lévesque jusqu’à la déclaration du 19 novembre 1984 explique de manière convaincante les étapes d’une réflexion...

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