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  • Les trois batailles de Québec. Essai sur une série de trahisons
  • Jules Racine Saint-Jacques (bio)
Jean-Paul de Lagrave , Les trois batailles de Québec. Essai sur une série de trahisons. Trois-Pistoles, Éditions Trois-Pistoles, 2007, 212 p.

Il est de ces champs de bataille sur lesquels on ne se hasarde jamais sans risque, même des siècles après que le feu des armes s'y soit tari. Au Québec, les Plaines d'Abraham sont assurément de ceux-là. L'historien des idées Jean-Paul de Lagrave a néanmoins choisi de s'y aventurer en publiant Les trois batailles de Québec. Essai sur une série de trahisons aux Éditions Trois-Pistoles. Entre le livre d'histoire et le réquisitoire nationaliste, cet ouvrage revient sur ce terrain miné pour y déterrer ceux que l'on aurait trop souvent pris, à tort, pour les responsables de la défaite française à Québec et accabler des stigmates du traître des personnages plus ou moins connus qui, du marquis de Vaudreuil à l'avocat François-Joseph Cugnet, auraient été trop longtemps épargnés par l'opprobre de la mémoire collective.

Tel qu'il l'annonce lui-même dès les premières lignes de son livre, de Lagrave entend sortir « les traîtres de l'ombre [pour] grandir l'action de ceux qui ont combattu pour la liberté de leur patrie au prix de leur vie ». Que le lecteur se le tienne pour dit: le savoir et la méthode historiques sont ici placés au service de la fierté nationale. En écho à l'entame, la chute de l'essai boucle une démonstration aussi captivante que teintée [End Page 524] idéologiquement : « La souveraineté du Québec ne pourra se vivre que dans une capitale libre, à l'orée des plaines d'Abraham, arrosées du sang des défenseurs de la patrie. » Dans l'intervalle, l'auteur déroule les trames événementielles de trois batailles qui ont consommé la défaite française en sol nord-américain lors de la Guerre de Sept ans: la bataille du 13 septembre 1759, la bataille du 28 avril 1760 et enfin celle du 31 décembre 1775.

Écrit dans une prose chamarrée de formules grandiloquentes, cet ouvrage tient des Henri-Raymond Casgrain, Philippe Baby Casgrain, Thomas Chapais, et autres François-Xavier Garneau, sur lesquels l'argumentaire est souvent appuyé. En conformité avec les canons disciplinaires de ces devanciers ancestraux, seuls l'individu et l'événement intéressent de Lagrave, qui s'attarde davantage à la psychologie des personnages en jeu dans la ville de Québec assiégée qu'aux courants transnationaux qui déterminaient l'évolutionglobalede laGuerredeSept ans. Poussant l'analyse événementielle parfois jusqu'à l'anecdotique, l'auteur ne ménage aucun détail pour faire l'apologie des quelques « braves » qui ont défendu la « capitale nationale » de la Nouvelle-France. Contre les attaques ouvertes d'un « ennemi » anglais partout dépeint dans les couleurs de l'ignominie, contre l'incompétence, l'indolence et la félonie rampante des Français et des Canadiens français qui ont facilité la conquête de la « patrie », l'auteur adosse la bravoure « extrême » de ceux qui tentèrent de la sauver. Aucune épithète n'est trop flatteuse pour encenser les bons, aucun qualificatif n'est trop fort pour noircir les méchants. Faut-il se surprendre d'un enthousiasme aussi manichéen, venant d'un titre publié par la maison d'édition de Victor-Lévy Beaulieu?

Outre cette désagréable propension à louanger les héros de la colonie et à diaboliser ses ennemis, le lecteur attentif remarquera le déséquilibre des chapitres, symptomatique d'un contenu inégal. En effet, l'auteur s'attache bien davantage à déceler les défaillances du camp français lors de la pre-mière bataille, la plus connue, que dans les reprises subséquentes des hostilités. Ainsi, le premier chapitre est assurément le mieux pourvu pour faire voir le rôle des traîtres...

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