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  • Le corps romanesque. Images et usages topiques sous l'Ancien régime
  • Chris Roulston (bio)
Le corps romanesque. Images et usages topiques sous l'Ancien régime. Actes du XXe colloque de la SATR. Avec figures Études rassemblé es et éditées par Monique Moser-Verrey, Lucie Desjardins et Chantal Turbide Québec, Les Presses de l'Université Laval, Les collections de la République des Lettres, Symposiums, 2009, xxii-662 p.

Ce recueil impressionnant des actes du XXe colloque de la SATOR contient trente-cinq articles présentés en quatre catégories : le corps souffrant, le corps éloquent, le corps surprenant et le corps métaphorique, qui offrent une analyse détaillée de la fonction, de la signification et du rôle culturels du corps sous l'Ancien Régime. À la suite d'une introduction, lucide et détaillée de Monique Moser-Verrey, la section sur le corps souffrant commence avec une analyse de Philip Stewart, qui souligne, par le biais d'un survol de gravures du corps souffrant au XVIIIe siècle, la qualité arbitraire des choix iconographiques qui se font pour illustrer l'essence d'un récit en images. Selon Stewart, les choix de scènes viennent souvent d'une motivation érotique, avec un regard axé sur le « sexe faible », bien qu'il existe aussi des victimes masculines, comme dans le cas de la castration d'Abélard dans une gravure de Charles Eisen. Pour Madeleine Jeay, l'érotique continue à être lié à la représentation du corps souffrant, ici en termes des topoï hagiographiques, qui deviennent hybridisés par le biais du récit romanesque. Dans l'exemple médiéval de La vie de Marie l'Égyptienne, le portrait de l'ermite va d'un corps blanc, beau et profane, au corps noir du pénitent, tout en puisant dans la description romanesque; ailleurs, bien que les femmes saintes soient désexualisées pour protéger leur chasteté, le thème du déshabillage reste constant. Selon Jeay, l'hagiographe emprunte souvent à la fiction pour séduire son public et pour théâtraliser le corps du pénitent. Dans le roman du XVIe siècle, Véronique Duchet-Gavé analyse, de façon parallèle, comment la beauté générique du corps [End Page 580] chevaleresque reflète une beauté intérieure, qui doit ensuite subir une transformation au cours du récit. De même avec l'hybridation du récit hagiographique et romanesque, il existe une ligne de partage entre le roman de chevalerie et le roman sentimental, où le corps exalté du héros devient affaibli et délabré, que ce soit par la guerre ou par l'amour. Dans chaque cas, ce que Duchet-Gavé appelle le « corps-outil » du héros doit confronter sa propre dégradation par le biais d'une force externe. De l'époque médiévale à l'époque coloniale, l'excellent article de Stephanie Chaffray examine la façon dont les descriptions du corps amérindien de la Nouvelle France font partie intégrante du projet colonial, créant non pas une ethnographie de l'autre, mais une « autre réalité ». En particulier, Chaffray défriche le discours paradoxal tenu par les Français autour de la pratique guerrière du prélèvement du scalp. La condamnant comme barbare, les Français et les Anglais finiront par la pratiquer eux-mêmes. D'une part, la colonisation est justifiée par l'insistance sur la sauvagerie des Amérindiens, d'autre part, il faut connaître intimement et partager les pratiques des autochtones pour avoir leur appui contre les autres pouvoirs coloniaux, telle la Grande Bretagne. La construction du corps amérindien et de ses pratiques guerriè res devient donc ce que Chaffray appelle « une construction pragmatique ». Catherine Gallouët nous mène ensuite du corps amérindien au corps noir de l'esclavage dans le discours romanesque du XVIIIe siècle. Bien que le corps noir soit représenté sous plusieurs angles empathiques, telles la rage de l'eunuque noir des Lettres persanes, la noblesse héroïque d'Oronoko, la sauvagerie rebelle...

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