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  • Autofiction et dévoilement de soi. Essai
  • Katarzyna Perić (bio)
Madeleine Ouellette-Michalska, Autofiction et dévoilement de soi. Essai. Montréal, XYZ éditeur, coll. Documents, 2007, 156 p., 23$

Dans son nouvel essai, Madeleine Ouellette-Michalska explore et présente la spécificité et le développement de la littérature d’ordre autobiographique et autofictionnel, et se demande pourquoi les récits inspirés par la vie de leurs auteurs ont autant de succès à notre époque. Ce questionnement entraîne immédiatement une réflexion sur la société contemporaine et les tendances qui y régnent.

L’auteure caractérise notre époque comme le temps de l’image et de la divulgation, où « [u]ne image vaut mille mots », et « le règne de la mise à nu volontaire et grégaire offerte en spectacle au regard démultiplié ». Dans la « société du spectacle », les tabous cessent d’exister et les gens partagent avec les autres les détails les plus intimes de leur vie dans des confessions publiques qui attirent des milliers d’auditeurs, lecteurs et spectateurs. Les frontières entre la vie publique et privée deviennent de plus en plus brouillées, et la fabulation de soi semble satisfaire les besoins tant des destinataires que des destinateurs. L’autofiction, « cette forme romanesque approximative », fleurit en reflétant notre époque, où la complexité, l‘instabilité et la confusion marquent la vie de tous les jours.

Comme le territoire de l’écriture basée sur le vécu ne parvient à pas se délimiter avec précision, l’auteure de cet essai se propose d’exposer les nuances entre les différents types de récits de ce genre. En s’appuyant sur la théorie de Philippe Lejeune, elle constate que l’autobiographie « se définit moins par ses éléments formels que par “le contrat d’identité” authentifiant l’auteur ». Le deuxième critère de l’œuvre autobiographique est son rapport à la vérité : « L’auteur d’un texte autobiographique promet de “dire la vérité sur son histoire” et “l’histoire de son texte” dont il fournit souvent la genèse ».

Mais en réalité, malgré tous les éléments communs, chaque récit peut se distinguer des autres de manière significative. Ainsi chez Annie Ernaux, son « l’écriture plate » « extrêmement dépouillée, visant l’épure dans la concision, l’ellipse, la simplicité » définit sa manière. Dans l’œuvre de Nelly Arcan, ce sont le regard, « le principal vecteur des signes d’existence », et l’image qui jouent le rôle le plus important. [End Page 604]

Ouellette-Michalska découvre également que l’autofiction est actuellement pratiquée surtout par les femmes, ce qui probablement a des causes historiques. Limitées par la tradition, les mœurs et le conditionnement social, les femmes revendiquent leur voix niée ou étouffée pendant des années, en s’exprimant dans leurs textes à la première personne. Cette subjectivité déclarée et l’accent mis sur soi sont sans doute liées à la question identitaire.

L’auteure note également que, dans les récits autofictionnels des femmes, le corps semble être omniprésent. Cette remarque est justifiée déjà au niveau du paratexte, car même les titres paraissent assez sugges-tifs : Passion simple d’Annie Ernaux, Putain de Nelly Arcan, La vie sexuelle de Catherine Millet. D’anciennes angoisses métaphysiques et certaines aspirations de l’âme semblent avoir remplacé le souci hédoniste.

En analysant la création des auteurs provenant de divers fonds culturels (les hommes, comme Jean-Paul Sartre ou Hector Bianciotti y sont aussi présents, même si en un nombre plus restreint), Ouellette-Michalska présente de manière érudite l’histoire et la tradition qui ont donné la naissance à l’écriture autobiographique et le récit auto-fictionnel dans sa forme contemporaine. Elle conclut que malgré son orientation vers soi et vers l’expérience individuelle, « [l]’écriture autobiographique n’exclut pas l’universalité. Elle lui donne un visage, une voix, des lieux de passage à la surface du globe qui bouge avec les pas de...

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