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Reviewed by:
  • La paix des braves : une lecture politique des Anciens Canadiens de Philippe Aubert de Gaspé
  • David M. Hayne
Jacques Cardinal , La paix des braves : une lecture politique des Anciens Canadiens de Philippe Aubert de Gaspé. Montréal, XYZ éditeur, coll. Documents, 2005, 207 p., 24$

Les commentaires sur Les anciens Canadiens sont légion et les notes qui composent le dernier tiers de cet ouvrage en reproduisent de copieux extraits. L'intention de Jacques Cardinal n'est pas de corriger ou d'amplifier l'apport de ses prédécesseurs : il veut au contraire démontrer que pour lui il s'agit d' « un roman fort engagé sur le plan politique » et voué « au travail de réécriture de l'histoire de la Conquête ».

Chaque épisode du roman apporte sa contribution à la démonstration. Le pacte d'amitié entre Jules d'Haberville et Arché de Locheill est « hautement symbolique », car il préfigure l'amitié qui doit régner entre [End Page 554] vainqueurs et vaincus dans la société post-1760. La providence est constamment à l'œuvre dans ce commentaire comme dans le roman lui-même: l'habitant Dumais, tiré de la débacle par Arché, est « miraculeusement sauvé par la providence », tandis qu'Arché, capturé et condamné au poteau par des Indiens, est libéré « puisque Dieu, en sa providence, en a autrement décidé ». Arché lui-même bénéficie d'un pardon qui prépare son rôle dans la nouvelle société : en incendiant les maisons de la Côte-du-Sud, il obéit à ses ordres et sauve son honneur de soldat britannique, justification que les d'Haberville vont approuver, car « tous les guerriers sont frères ».

Aubert de Gaspé n'hésite pas à corriger François-Xavier Garneau sur la précipitation de Montcalm et met en relief la bataille de Sainte-Foy (1760) plutoˆt que celle des Plaines d'Abraham (1759), assurant ainsi la double victoire et « la paix des braves ». Les multiples réconciliations d'Arché avec Jules, avec la Mère supérieure et avec d'Haberville, anticipent les conciliations difficiles qui vont caractériser la société sous la domination anglaise. Jules, par sa bravoure et ses blessures, et Blanche, par le sacrifice de son amour et de son mariage, déchargent leur dette envers la France, et Jules aura le droit d'épouser une Anglaise ; leur fils incarnera les meilleures qualités des deux peuples. La maison construite et occupée par Arché et Dumais représente l'avenir bilingue et biculturel du pays, et le projet de défrichement et de colonisation dirigé par l'Écossais se réalisera sous les auspices du mouvement politico-cléricaliste du XIXe siècle.

L'argumentation ne manque pas d'ingéniosité et nous invite à relire le roman à la lumière des événements ultérieurs, voire des déceptions de notre époque. L'absence d'un index est compensée en partie par l'ordre rigoureux du commentaire, qui suit le texte du roman « de chapitre en chapitre, d'épisode en épisode, de scène en scène ».

David M. Hayne
Département d'études françaises, Université de Toronto
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