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Reviewed by:
  • L’enfance et l’errance. Pour un appel à l’autre. Lecture mythanalytique du roman québécois contemporain (1960–1990)
  • Jean-Pierre Thomas (bio)
Monique Boucher, L’enfance et l’errance. Pour un appel à l’autre. Lecture mythanalytique du roman québécois contemporain (1960–1990) Québec, Éditions Nota bene, coll. terre américaine, 321 p., 25,95$

Pour qui s'intéresse aux transformations de l'imaginaire d'une communauté et aux empreintes laissées par ces changements dans la littérature de celle-ci, la mythanalyse constitue un outil de choix. Monique Boucher a précisément jeté son dévolu sur cet outil pour mener à bien la recherche dont elle livre les résultats dans L'enfance et l'errance. Pour un appel à l'autre, ouvrage paru aux Éditions Nota bene au printemps 2005. Elle en a profité pour étayer les mérites des théories de l'imaginaire et pour montrer ce que ces dernières offrent aux chercheurs désireux de mettre au jour la matière symbolique qui caractérise les productions culturelles d'un peuple à un moment précis de son histoire. À vrai dire, Monique Boucher s'est donné pour but de repérer les traces mythiques inhérentes à certains textes de la littérature québécoise afin de déterminer le paradigme littéraire actuel. Il s'agit ici d'une « exploration des strates profondes de l'imaginaire roma-nesque québécois contemporain, dans ce "récit commun" qui a accompagné une phase importante de l'évolution culturelle, la Révolution tranquille ». Compte tenu que l'étude s'inscrit dans un courant d'analyse peu souvent exploité par la critique littéraire québécoise, elle ouvre d'intéressantes perspectives de recherche.

Bien que l'objectif principal de Monique Boucher puisse sembler au premier abord plutôt général, il se précise rapidement au fil de la lecture et les barèmes établis permettent de cerner avec facilité le sujet à l'étude. L'enjeu majeur consiste à « retrouver les traces de l'interaction entre l'universel et le particulier », à rendre compte des tensions qui animent l'imaginaire québécois à un moment précis de son évolution. Par-delà ce travail de localisation de vestiges mythiques surgit bientôt une problématique confinant à la question de l'identité de la communauté québécoise, et l'étude de textes ne représente ici qu'une étape initiale, importante certes, dans l'établissement des traits imaginaires de la culture étudiée, mais une étape qui devra être prolongée par un retour vers le contexte, de manière [End Page 76] à reconnaître les implications et les répercussions du processus de mythification à l'œuvre.

Le corpus étudié par Monique Boucher se compose des œuvres romanesques de Michel Tremblay, de Réjean Ducharme et d'Anne Hébert, œuvres choisies parce qu'elles ont marqué l'institution littéraire québécoise. La mythanalyse, dans un souci d'efficacité, doit prendre en compte un maximum d'œuvres pour bien définir le « récit collectif » marquant d'une communauté, si bien que viennent se greffer à l'ensemble principal des textes de Marie-Claire Blais, de Jacques Poulin et de Jacques Godbout. Longtemps tenues en laisse par des instances restrictives, culture et littérature québécoises donnent à découvrir un mythe fondateur pluriel, et leur récit commun se nourrit de variantes nombreuses. Monique Boucher, plutôt que de nous resservir le paradigme d'analyse habituel fondé sur le rôle incontournable joué par l'Église dans l'établissement de la culture québécoise — mais ne pouvant l'abandonner tout à fait —, propose l'hypothèse selon laquelle un nouveau paradigme aurait vu le jour au tournant des années 1960 : les valeurs traditionnelles sont désormais menacées par la révolte et la liberté. Boucher n'hésite pas à récupérer la notion de basculement entre sédentarité et nomadisme pour appuyer ses dires et cette caractéristique de la société québécoise sert de base à la thèse avancée, qui stipule qu'« au-delà des résonances idéologiques...

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