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Reviewed by:
  • Journal dérivé. II. L’écriture 1972–2000, and: Naître, c’est se séparer. Essais littéraires et politiques
  • Jimmy Thibeault (bio)
Bruno Roy, Journal dérivé. II. L’écriture 1972–2000 Montréal, xyz éditeur, coll. Documents, 216 p., 16$
Bruno Roy, Naître, c’est se séparer. Essais littéraires et politiques Montréal, xyz éditeur, coll. Documents, 2004, 176 p., 24$

Essayiste, poète et romancier, Bruno Roy, qui a été président de l'uneq de 1987 à 1996 et de 2000 à 2004, nous entraîne, avec Naître, c'est se séparer et le deuxième tome de son Journal dérivé, dans une profonde réflexion sur la place qu'occupe l'écriture dans le contexte social, culturel et politique du Québec depuis les années 1970. Pour lui, il ne fait aucun doute que l'écriture représente une parole individuelle qui résonne nécessairement dans et pour un espace collectif. Entre l'intime et le collectif, l'écriture permet à l'individu de marquer son existence dans le monde auquel il appartient, de participer aux débats qui y ont cours et de s'opposer, parfois, aux penseurs qui le gouvernent. C'est ainsi qu'il affirme, dans Journal dérivé : « [...] j'écris toujours contre un esprit de soumission afin de maintenir l'intégrité de la pensée et son corollaire : la liberté. » Une liberté qui, bien qu'énoncée par une prise de parole intime, ne concerne cependant jamais totalement que le sujet-écrivant, comme il le souligne dans Naître, c'est se séparer : « Partout l'écrivain écrit dans la solitude. Il est seul, mais il n'est pas isolé. À l'inverse, pour reprendre la conclusion du poème de Michèle Lalonde, Speak White, il sait qu'il n'est pas seul. »

Naître, c'est se séparer reprend une série de textes parus depuis 1994 dans divers ouvrages, revues ou journaux, soit sous forme de conférence, de débat ou de mémoire. Ces textes, qui ont fait l'objet d'une réécriture, tournent autour des préoccupations que l'on connaît à l'auteur : la naissance, la langue, l'enseignement et la littérature québécoise. Cette multiplicité des sujets abordés par Bruno Roy s'inscrit dans un projet bien [End Page 89] défini par l'auteur qui est de proposer une réflexion personnelle sur la question d'un Québec souverain. La construction de l'argumentation suit donc cette logique qui vise à présenter un point de vue propre à un « je-écrivant » qui s'assume pleinement dans la subjectivité qu'il démontre à définir sa place dans le projet collectif. C'est en effet à partir de son expérience personnelle que Roy pose la question de l'indépendance du Québec dans le premier chapitre, en citant une lettre qu'il a lui-même écrite à Gaston Miron en 1989, et où il raconte sa prise de conscience politique à travers un vers du poème « Pour mon rapatriement » : « Un jour, j'aurai dit oui à ma naissance. » Si, pour Roy, ce vers devait d'abord lui apprendre à s'affirmer et à exister dans la pleine conscience d'un « moi » pour se réaliser dans le langage, il se pose également comme le leitmotiv à l'argumentaire du livre : l'indépendance du Québec n'est possible que s'il y a un désir véritable de s'affirmer et de s'assumer comme entité culturelle à part entière. Roy fait alors état d'une langue française reculant devant l'anglais, de l'effacement de la littérature québécoise dans le domaine de l'enseignement et d'une culture nationale rejetée au profit d'un multiculturaliste canadien. Ainsi, la préoccupation identitaire qui amène Roy à s'affirmer au début du livre en tant que sujet est alors projetée sur l'ensemble du projet collectif : le « je-écrivant » qui s'assume suggère que le projet d'indépendance du Québec doit représenter d'abord et avant tout le lieu d'une...

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