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  • Anatomie d’un référendum (1995). Le syndrome d’une désinformation médiatique et politique
  • Dominique Garand (bio)
Jean Levasseur, Anatomie d’un référendum (1995). Le syndrome d’une désinformation médiatique et politique Montréal, XYZ éditeur, coll. Documents, 2000, 264 p., 24,95$

Paru en 2000, cet essai analytique n'a pas reçu l'attention qu'il mérite. À notre connaissance, ni Le Devoir ni La Presse n'en ont signalé l'existence. Ce déni est-il dû au fait que l'essai développe un point de vue particulièrement critique à l'égard de nos quotidiens, en particulier en ce qui concerne l'éthique journalistique ? On peut le penser. Il est vrai que les analyses proposées par Levasseur mettent en relief de façon saisissante de nombreux [End Page 163] cas d'incongruité observés dans la plupart des articles qui ont prétentu rendre compte de la bataille référendaire de 1995. Cela dit, l'essai n'est pas pour autant un pamphlet; il est au contraire documenté de façon très précise et développe une argumentation serrée et équilibrée autour d'enjeux sociopolitiques dont l'importance ne fait aucune doute.

Quel est donc l'objet du livre ? Cette « anatomie d'un référendum » est avant tout, comme le suggère le sous-titre, une réflexion sur la désinformation et sur le manque d'objectivité des médias, en l'occurrence les journaux. Levasseur s'attache à montrer comment s'effectue cette désinformation, ou manipulation de l'information, à travers des procédés comme l'omission, la surenchère, le cadrage des événements, la présomption non corroborée, l'allusion, le jugement implicite (ces termes sont de nous, nous présenterons plus loin les procédés identifiés explicitement par l'auteur). Il montre aussi comment cette désinformation, loin d'être inhérente au métier de journaliste, est déterminée par des parti pris idéologiques ou politiques. Le constat global est donc que le milieu de l'information n'est pas aussi autonome des mondes politique et économique qu'il veut bien le prétendre. En soi, cette constatation n'a rien de bien surprenant : il est de notoriété publique en effet que La Presse s'est rangée du côté du « Non » lors du référendum de 1995, alors que Le Devoir encourageait plutôt ses lecteurs à voter « Oui ». Mais ces positions éditoriales, tout à fait légitimes puisqu'il s'agit de décisions dûment argumentées, n'autorisent pas à éluder l'un des principes éthiques du journalisme d'information qui est de rendre compte avec le plus d'objectivité possible des événements, des discours et des contextes dans lesquels s'insèrent ces événements et ces discours. Le livre de Levasseur démontre indubitablement que ce principe éthique a été maintes et maintes fois enfreint tout au long de la bataille référendaire par l'un et l'autre des journaux québécois et ontariens.

Pour mener à bien son enquête, l'auteur a limité ses analyses à quatre moments-clés de la bataille référendaire, quatre incidents autour desquels se sont polarisés les affrontements. Le premier affrontement est celui qui a suivi la profession de foi fédéraliste des hommes d'affaires Laurent Beaudoin (Bombardier) et Claude Garcia (Standard Life). Dans le cas de ce dernier, la profession de foi prenait la forme d'un encouragement à « écraser » les forces souverainistes, expression qui souleva un tollé chez les défenseurs du Oui. Le deuxième affrontement eut lieu après des déclarations jugées antifrancophones ou antiquébécoises de deux sportifs, Mike Lansing (Expos de Montréal) et Mike Keane (Canadiens de Montréal). Le troisième affrontement fut provoqué par une déclaration de Lucien Bouchard au sujet du manque de fertilité des Québécoises « de race blanche ». Enfin, l'ultime affrontement, quelques jours avant le scrutin, fut provoqué par le rassemblement sur la Place du Canada, à Montréal, de Canadiens venus de...

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