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  • Journal 1907–1927
  • François-Marc Gagnon (bio)
Rodolphe Duguay, Journal 1907–1927. Texte intégral établi, présenté et annoté par Jean-Guy Dagenais avec la collaboration de Claire Duguay et Richard Foisy Montréal, Les Éditions Varia, coll. Documents et biographies, 2002, 753 p.

Avec la collaboration de Jeanne L'Archevêque, épouse du peintre, et de Claire Duguay, sa fille, Jean-Guy Dagenais a travaillé à une édition véritablement magistrale du journal parisien du peintre Rodolphe Duguay. Comme Laurier Lacroix le dit dans l'avant-propos : « La publication de ce journal tient à la persévérance de deux hommes. Rodolphe Duguay qui pendant vingt ans l'a rédigé, mais aussi celle de Jean-Guy Dagenais qui a pris la peine de le transcrire et de l'annoter. Dans cet ouvrage, les deux récits deviennent indissociables. Les faits et événements relatés par l'artiste trouvent leur écho dans la patiente recherche de l'historien qui sait redonner un contexte aux déambulations physiques et morales de Duguay ». On ne saurait mieux dire. Le véritable plaisir de ce monumental ouvrage est dans les notes en bas de pages. Dagenais semble prévoir à chaque fois les interrogations du lecteur et répond à toutes ses inquiétudes, ses curiosités et à tous ses manques d'information. Grâce à ces notes, il se dégage un portrait vivant du milieu parisien où Duguay a vécu. [End Page 167]

Que dire du texte du Journal lui-même ? Certes il a quelque chose d'interloquant pour un lecteur d'aujourd'hui. Très attaché à sa foi religieuse, très dévot, le jeune Rodolphe Duguay ne perd pas son âme dans cette Babylone qu'est le Paris des années 1920. Ouvrez une page au hasard et vous risquez d'y lire : « Hier matin communié ainsi que ce matin, ça fait du bien ». Ou encore : « Cet a.P.M. allé à confesse... ». Que d'heures passées à Saint-Sulpice à prier pour les siens, à écouter des sermons, à assister aux offices — la messe bien sûr, mais aussi les neuvaines, les saluts, les mois de Marie... Très attaché à son cher Nicolet, il ne le quitte pour ainsi dire pas, vivant littéralement dans l'attente des lettres de sa famille ou de ses amis. Constamment, il anticipe le retour dans son « Cher Pays ». Sur ce qui se passe à Paris, on le voit en contact avec tous les Canadiens de passage, des abbés, des médecins, des artistes (W. Brymner, G. Delfosse, les sœurs des Clayes, J.-B. Lagacé, A. Laliberté, R. Pilot...). Duguay qui travaille dans les académies (Colarossi et Julian) à améliorer son dessin, ses notions d'anatomie et de perspective ne manifeste pas une grande ouverture à l'art moderne. Témoin sa réaction à l'exposition du Salon d'automne de 1920 : « Épouvantablement laide, excepté une ou deux peintures... ».

Pourtant, Duguay est à Paris quand a lieu la révolution cubiste. Ni Picasso, ni Braque, ni Juan Gris ne sont nommés dans son Journal, même pas pour en dire du mal. Les peintres admirés sont Millet, Corot, Daubigny... On a l'impression qu'il vit au siècle précédent. Mais c'est à mon sens ce qui rend si précieux ce journal de Duguay. Il nous permet de comprendre le chemin qu'il nous a fallu parcourir pour atteindre à la modernité.

Pellan n'a pas laissé de journal, mais il est à Paris à partir de 1926 jusqu'à la guerre. Il suit les cours de l'École des beaux-arts, mais lui, il s'ouvre à l'art de son temps. Plus audacieux encore, il visite Picasso, rencontre Miro, se procure tout ce qu'il peut sur le surréalisme.

Borduas arrive à Paris deux ans après le retour de Duguay au Canada. Comme lui, il a été marqué par la religion catholique. Après tout, il s'inscrit aux Ateliers d'art sacré de Maurice Denis et de Georges Desvallières. Lui aussi tient Journal. Il fait preuve tout de même d'un peu plus de curiosité pour l'art qui se fait. Et chose impensable sous la plume...

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