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sciences humaines 129 lentement, peut-être même dans le désordre, en butinant, au gré des promenades et des observations. (PASCAL RIENDEAU) Luc Bureau, Géographie de la nuit Montréal, l'Hexagone, coll. La ligne du risque, 1997, 254 p. Géographie de la nuit de Luc Bureau se présente comme un objet quelque peu inhabituel, tant dans sa forme que dans son contenu. Le livre contient trois parties principales: dans la première, l'auteur met de l'avant la probl ématique générale de son essai (*comprendre en quoi le nocturne, comme idée et comme fait concret, imprègne notre imaginaire et compose avec lui les attributs les plus entêtants des lieux que nous hantons occasionnellement ou durablement+), ainsi que les prolégomènes à une histoire et à une culture de la nuit; dans la seconde, il privilégie les rapports étroits et complexes entre la ville et l'eau, et dans la dernière, il explore les imaginaires européen (nocturne) et américain (diurne). Deux sections assez originales dans leur facture, non paginées, intitulées * Résonance I+ et *Résonance II+, composées de photographies ou de reproductions de tableaux représentant la nuit, avec texte en regard B courts morceaux de l'auteur présentés comme de petits poèmes B accompagnent l'ensemble du propos. Comme on peut dès lors le pressentir, avec Géographie de la nuit, Bureau ne nous offre pas véritablement un ouvrage académique, et encore moins didactique. D'ailleurs, pourrait-on vraiment concevoir un traité ou un manuel géographique de la nuit? Dans son texte, la théorie se mêle à de très nombreuses réflexions personnelles; l'auteur ne semble pas tant chercher à développer des hypothèses fortes ou inédites qu'à explorer de différentes façons l'univers fascinant de la nuit, en misant sur sa *plurivalente signification+. L'aspect le plus novateur de son entreprise réside sans doute dans sa volonté de vouloir décloisonner les disciplines: outre la géographie, l'histoire, la mythologie, la littérature et les sciences sont convoquées dans son parcours. Sa méthodologie se veut aussi beaucoup plus souple que rigoureuse: *Je ne m'autorise ici, affirme-t-il, qu'à faire du vol en rase-mottes; je me laisse dériver vers autant de perspectives que mes goûts et mes humeurs en font naître, sans chercher de logique d'enchaînement très ferme [...]+. Bref, Bureau entraîne son lecteur dans une longue traversée de la nuit, où celui-ci retrouvera les traces de poètes et d'écrivains qui ont cherché à dire la nuit, où il verra aussi se rejouer le sort de quelques mythes fondateurs. L'avant-propos donnait déjà l'allure de l'essai; le discours est savant, mais le ton, lui, demeure léger, empreint d'humour et d'ironie, une stratégie qui ne va pas toujours sans risques. Si l'idée de départ est originale, si la recherche effectuée par l'auteur s'accompagne bien d'une démarche plus subjective, certains aspects 130 lettres canadiennes 1999 auraient demandé un développement plus substantiel. En ce sens, la première partie suscite beaucoup plus de questions que de réponses. Par exemple, la succincte histoire de la nuit qu'il nous propose au deuxième chapitre demeure trop brève et trop anecdotique pour réellement nous donner un sens profond de ce que pourrait être une histoire de la nuit à partir des textes d'auteurs célèbres (Aristophane, Juvénal, Pétrone) auxquels il fait référence. Cette section paraît même emblématique de l'ensemble de l'ouvrage, c'est-à-dire que dès que le propos devient plus complexe, plus exigeant, soit que l'auteur bifurque et emprunte le chemin du discours un peu plus convenu, ou qu'il termine sa discussion abruptement. Les fins de sections ou de chapitres donnent souvent une impression d'escamotage. Dans la seconde partie, les chapitres *Villes de nuit+ et *La nuit liquide+ n'arrivent pas toujours à sortir...

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