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SCIENCES HUMAINES 495 Quoi qu'il en soit, Le Can'ada fran(ais ... temoigne d'tme recherche fine, prudente et serree, qui Ieve les voiles d'un mythe sans se preter a une hermeneutique sterile du soupc;on et du procE~s d'intentions. Par son plaidoyer pour une plus grande rigueur methodologiquef I'ouvrage milite aussi en faveur d'une deontologie dt; l'analyse scientifique des communautes minoritaires. A ce double titre, la syntttese des vingt armees de travail de Roger Bernard merite bien l'interet et la sympathie du lectorat. (MARTIN PAQUET) Donald Smith, D'une nation a['autre. Des deux solitudes afa cohabitation Montreal, Stanke, 1997, 166 p., 17,95$ Ce livre comprend trois parties: d'abord,I'itineraire personnel de l'auteur, auquel succede un « dialogue imaginaire» avec des membres de la communaute anglophone denonces par Donald Smith (au premier rang desquels WilliamJohnson, Diane Franciset Barbara Arniel); puis des entrevues avec Jim Corcoran, Larry Hodgson, Nancy Huston et Nanette Workman, ces «voix de la comprehension». La premiere partie comprend une trentaine de pages. Donald Smith, apres avoir rappele que «Ie moi est halssable»f presente son «propre itineraire afin d'illusLTer les reelles possibilites de connaltre l'autre peuple, l'autre langue, l'autre culture, d'en faire son identite profonde sans pour autant nier ses origines». De sa naissance aToronto asa vie actuelle dans l'Outaouais quebecois, Smith a acquis peu apeu - tres souvent par I'entremise de l'ecole - ses convictions sur « la dualite linguistique, culturelle,«identitaire» du Quebec et du Canada anglais ». Al'ecole secondairef Ie professeur Posteuka lui « a donne envie d'apprendre Ie fran~ais »; au College Glendon de l'Universite Yorkf Hedi Bouraoui 1'« initia ala notion de la francophonie »; tandis que Jacques Cotnam «partagea avec [lui] les avanies de son adaptation a la Ville-Reine». II frequenta par la suite l'Universite Laval, la Sorbonne (maitrise en lettres) et, enfinf rUniversite d'Ottawa (doctorat) au il fit la connaissance d'Adrien Therio qui lui proposerafala fondation de la revue Lettres quebecoises en 1976, la chronique des entrevues, prelude aplusieurs rencontres d'ecrivains. Bref, cursus litteraire, rencontres, amities, carriere dans les lettres (enseignement, edition, publication) balisent Ie parcours de Donald Smith, qui« porte [en lui] des identites quebecoise, fran~aise, anglaise, irlandaise, ontarielU1e, manitobaine ». eet enrichissementque representent ces « identites multiples» ne semble pas partage par tous, notamment WilliamJohnson, Diane Francis et Barbara Amiet ces « fanatiques » qui colportentfselonSmith, force prejuges haineux al'endroit du Quebec. Williamlohnson, tout president d'Alliance Quebec qu'il est, possede une formation en litterature. Smith lui reproche de traiter 496 LETTRES CANADIENNES 1998 Felix-Antoine Savard de «racist priest ». Indigne, il s'efforcera de demontrer Ie caractere universel de Menaud, maItre draveur et soutiendra que «la litterature quebecoise n'est pas xenophobe ». Suivra la denonciation de« I'offensive inquisitoriale de Diane Francis et de Barbara Arniel », conclue sur ce cri du cceur: «Mais vaus [Diane Francis] etes tellement peu representative que je garde espoir. Un jour, peut-etre, les nations canadienneanglaise , francophones (quebecoise, acadienne, canadienne-fran<;aise) et autochtones vivront ensemble dans Ie respect et la comprehension. ». Par aiileurs, Smith, qui semblait vouloir Ie ranger dans la meme categorie que les trois personnages precedents, absout Mordecai Richler, «ecrivain de toute premiere importance» (cliche d'usage), qui «COIlUne polemiste "national"»» Ie « fache», rnais« ne [lui) fait pas honte». Enfin, i1« s'entretient » avec Ray Conlogue. S'il admet qu'il «presente avec perspicacite, dans Ie Globe and Mail, Ie Quebec culturel au Canada anglais», Smith n'en pretend pas moins que Conlogue « denigre sa propre culture, repand des faussetes sur Ie manque d'attachement des anglophones a leur pays, et [...J renforce les prejuges des Quebecois francophones contre I'identite canadienne-anglaise ». Ce n'est pas rien... Le livre se termine par des entrevues avec les chanteurs Jim Corcoran et Nanette Workman, l'auteur horticole Larry Hodgson et l'ecrivaine Nancy Huston. Choix eclectique s'il en est! Surtout que Smith mentionne qu'il elit pu en choisir d'autres, dont Neil Bissaondath, Dany Laferriere et Stanley Pean. Pour Ie litteraire que je suis (et qU'est Smith), il elit peut-etre ete plus interessant de rencontrer ces ecrivains. Quoi qu'il en soit, ces entrevues nous permettent de connaltre Ie cheminement personnel de ces personnes qui ont choisi «Ie fran<;ais comme langue d'expression». Je m'arreterai quelques instants aNancy Huston. Nee aCalgary, elle a etudie aux EtatsUnis et en France OU elle vit depuis 1973. Ene n'a done jamais vecu au Quebec, mais, avance-t-elle, « [a]u fond, je crois que si mes livres sont si bien "entendus" par les QuebEkois, c'est qu'ils se situent comme moi au croisement, ala frontiere inconiortable des deux memes cultures: 1a fran- <;aise et la nord-americaine... ». Al'epoque de ce que Nancy Huston appelle un «mauvais souvenir» (c'est-a-dire la remise fort contestee du prix du Gouverneur general attribue a Cantique des plaines), la romanciere et essayiste aurait-elle dit la rneme chose? On se rappellera que des journalistes et editeurs avaient revoque en doute Ie choix du roman de Nancy Huston pretendant que c'etait une ceuvre traduite. A l'epoque, Nathalie Petrowski avait fait montre d'une belle intolerance: «On a beau invoquer sa nationalite canadienne et sa parfaite maitrise du fran<;ais, eile [Nancy Huston] reste lUle anglophone hors Quebec et une Canadienne hors Canada . Et bien qu'officiellement, les prix fran~ais du Gouverneur general soient reserves it n'importe quel auteur qui ecrit dans la langue de Lucien Bouchard, ces prix depuis leur creation ont presque toujours ete decernes a des Quebecois» (Nathalie Petrowski, « Bar payant}), La Presse, 18 SCIENCES HUMAINES 497 novembre 1993)' Pour sa part, Jean Royer pretendit que la remise du prix aNancy Huston, « [c],est une fac;on comme une autre d'eviter la litterature dite quebecoise. Pour certains medias "nationaux" comme pour l'institution litleraire JJ canadian / canadienne", passer par Paris est une fac;on d'eviter la litterature quebecoise» (<< Un prix aune Q2uvre "bilingue"», Le Devoir, 7 dtkembre 1993)· Ces deux citations donneraient presque raison a ceux qui denoncent Ie dogmatisme de certains intellectuels quebecois francophones... Je n'entrerai pas dans ce debat, mais a vrai dire il rejoint Ie contenu meme du livre de Smith: l'intolerance des uns et des autres. Smith a totalement raison de denoncer acor et acri Ie sectarisme des « soi-disant porte-parole des Anglo-Quebecois ». Mais qu'en est-il des discours de certains intellectuels quebecois francophones? **~ D'une nation a['autre. Des deux solitudes afa cohabitation m'a laisse quelque peu songeur. Smith en appelle aune grande fraternite humaine dans Ie respect des differences et la richesse partagee des identites multiples. L'auteur repond au sectarisme de certains anglophones en prenantexemple sur son propre cheminement que renforcent ceux de Corcoran, Workman, Hodgson et Huston. Certes, persOlme n'est contre la vertu. Mais un parcours, fut-il exemplaire, suffit-il afonder une demonstration? En outre, Ie ton enflamme et exuberant de Smith, sti! est un temps rejouissant, devient peu apeu un brin ridicule. Son emballement lui fait perdre parfois Ie sens de Ia mesure: «Depuis 1957, Paul Anka, d'Ottawa, fait chanter Ie monde entier avec sa "Dianal l [ ••• J»; «Neil YOW1g, certainement un des chansonniers troubadours les plus influents de ce siecle [...] »; «Karen Kain y contribue par son talent universel »; «eBC Radio est reconnue dans Ie monde entier comme etant independante )}; « les chanteurs Jim Corcoran et Nanette Workman, tous deux chefs de file de la chanson quebecoise depuis plus de deux decennies »; Jim Corcoran serait Ie «maitre de la musique acoustique et des paroles incisives et poetiques qui font chanter et Ieflechir les francophones du monde entier ». N'en jetez plus, la cour est pleine! Cette surenchere verbale etait deja presente en quatrieme de couverture, qui annonce W1 «essai iImovateur» et proclame qu'« indispensable ala comprehension de notre temps, ce livre sera longtemps une reference absolue». De qui veut-on se moquer en exagerant de la soyte l'interet de ce livre? Un tel texte ne sert qu'a Ie discrediter! Evidemment, Donald Smith ne peut etre tenu responsable de I'emballement commercial de son editeur; toutefois, on peut presumer qu'il a approuve ce texte! De plus, l/auteur participe acette surenchere en declarant d'entree de jeu: «Vous decouvrirez dans les pages qui suivent des declarations qui vous scandaliseront [...] ». Qui sera scandalise? D/eventuels lecteurs francophones qui ne connaissent pas la francophobie des William Jolmsonl Diane Francis et 498 LETTRES CANADIENNES 1998 compagnie? Ceux qui I'ignoraient n'ont probablement jamais Iu leurs textes. Liront-ils davantage Ie livre de Smith, paru chez Ie meme editeur qu'Anglophobie de William Johnson? Dans D'une nation al'autre. Des deux solitudes afa cohabitation, Smith revient sans cesse sur Ie principe «des trois nations ou des trois peuples: canadien-anglais; quebecois, acadien et canadien-fran~ais; autochtone (amerindien et inuit) ». Ce leitmotiv, cette obsession, toutefois, n/est jamais approfondi; cet eden de la cohabitation harmonieuse releve de la pensee magique. D'autre part, si Smith semble tenir obstinement au principe des trois nations, la probIematique de ce livre se limite «aux habitants du Quebec et du reste du Canada », comme l'indique au demeurant Ie titre qui fait" reference adeux nations et adeux solitudes. Sa trajectoire existentielle et intellectuelle ainsi que son poste de professeur al'Universite Carleton d'Ottawa eussent surement justifie qu'il consacrat quelques pages acette nation francophone, qu'il appeUe de tous ses vceux. II n'a pas cru bon de Ie faire, tout asa defense du Quebec et de Felix-Antoine Savard. Entin, d'autres affirmations suscitent la discussion, notamment celle-ci :«U]'en suis venu aIa conclusion qu'une certaine forme d/unilinguisme est essentielle pour assurer 1a survie de la langue franc;aise au Quebec, langue saine, non folklorisee [...J». Qu'entend Donald Smith par une langue«saine », par «( une certaine forme d'unilinguisme»? La bonne foi et l'enthousiasme ne peuvent toujours suppleer au manque d'analyse. (ROBERT YERGEAU) Josee Vincent, Les tribulations du livre quebecois en France (1959-1985) Quebec, Nuit blanche editeur, serie Etudes des cahiers du CRELIQ, 1997,221 p., 22$ Denis Saint-Jacques, Jacques Lemieux, Claude Martin et Vincent Nadeau Ces livres que vous avez aimes. Les best-sellers au Quebec de 1970 II aujourd'hui. Edition revue et remise ajour Quebec, Nuit blanche editeur, 350 p., 15$ Les tribulations du livre quebecois en France (1959-1985) de Josee Vincent se caracterise en premier lieu par 1a precision et l'hoIU1etete de son titre, au contraire de bien des ouvrages savants qui annoncent I'ocean pour ensuite detailler une vague. Cette etude ne parle ni de la litterature quebecoise, ni des auteurs quebecois, sinon par implication logique, mais bien du livrefait au Quebec et de ses tentatives plutot infructueuses (d'ou« les tribulations »)) pour penetrer Ie territoire fran\ais. PIusprecisement, Josee Vincent enquete sur les tentatives subventiol1neeS d'infiltration - par voie de distribution et de promotion - du marche fran<;ais. Deux motivations fondarnentales, comrnerciale et ideologique, poussent les editeurs adiffuser leurs livres en France. Le marche fran~ais, d'une part, ...

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