Poésie 1993–1994

- So shot with light, so sharply defined 76 LEITERS IN CANADA 1993 I cut my finger on the white edges of this paper. I cut my eyes on the keen edges of your absences. I am faithless to you, distant one. I lie with your blinding shadow, your White mind. In the five decades since P.K. Page began her poetic career, in the three since MacEwen began hers, the world of Canadian poetry has both deepened and broadened. While this year's crop offered few fireworks, its breadth and depth are indicative of the strength of Canadian poetry. Poesie 1993-1994 CECILE CLOUTIER La poesie depuis 1993 a connu des annees fastes, sous certains aspects. Par exemple, on a commemore les quarante ans de I'Hexagone par une serie de manifestations, les cinquante ans de la disparition de SaintDenys Garneau par quatre colloques universitaires et un mois de CE~le­ brations a Sainte-Catherine de Fossambault. 1994 nous a apporte Ie devoilement d'un monument au poNe inconnu lors du Festival international de poesie de Trois Rivieres, de meme que la pose de plusieurs centaines de plaques avec des textes de poemes qui constituent la promenade de la poesie dans cette capitale du poeme. Comme toujours, de nombreuses publications, des lancements, des lectures, bref de l'enthouSlasme . On ne parle plus autant de l'amour, mais plutot du desir. Presque pas de cantique au pays. Plus que jamais, on apprivoise la mort. La nature continue d'etre une valeur sure. Tres peu de poesie feministe! Le theme de l'enfance revient en force. Un peu partout des chats apparaissent. Beaucoup de textes hermaphrodites mi-prose, mi-poeme qui chantent, cernent, expliquent souvent l'ecriture. On celebre l'ailleurs, Ie voyage. On cherche son arne. Le style est assez sage. Pas de nouveaux Gauvreau ni de Duguay! Le jazz n'allume plus la phrase. Le surrealisme emerge rarement. Beaucoup POESIE 1993-1994 77 de sosies de l'halku! Presque plus d'influence des theories litteraires, meme chez les etudiants en lettres! Peu de references a une grande culture universelle! Peu de joual aussi. Une langue tout pres des sens! Comme d'habitude, I'Hexagone nous convie ala lecture d'une fournee de certains des meilleurs poetes du Quebec. En 1993, Michel van Schendel , dans L'impression du soud ou de l'etendue la parole nous confie deux cahiers : «Le premier propose une suite de poemes de vision par enregistrement , sans les donner a voir; Ie second imagine Ie journal d'une ecriture .» C'est un «autrement-dit» de la poesie, car il faut retrouver «Ie tremble du dit ». II est question d'un art poetique qui participe aussi de la critique et qui connait les theories litteraires. Des remarques pointues et beaucoup de culture! Dans Ie recueil Le verbe etre de Paul Chanel Malenfant, il semble bien que cet etre soit ala fois essence et existence. II est fait d'une odeur, d'un geste, d'un cri de lumiere dont il sous-tend la pensee car «la terre est en voie de presence» et il faut noter «la part obscure des mots sur la fa>> ou«la nuit devient parfois lumineuse de par ce qui brille en nous ». Mais aut~ur tant de soi-disant aphorismes vides. Quant a Bali imaginaire de Fran~oise Le Gris, ces poemes, illustres de peintures et dessins de Claude Blin, font ressortir d'abord la couleur, puis la lumiere et la forme. Ce sont en quelque sorte des poemes-tableaux, philosophiquement notres, avec des citations tirees de la Iegende de Ramat Sita. «Les paroles dans les mots sont des oiseaux.» Ces textes conjuguant peinture et pensee indiennes exaltent aussi Ie mot-valise «aperce -voir» souligne par l'auteur. Marc Vaillancourt est un mathematicien. II nous apprend, entre autres, dans Lignes de forces, que aimant a donne diamant en fran~ais. II apparait un peu comme notre Roubaud. II croit que «l'univers s'ordonne aut~ur du mot» et il nous confie «je suis un petit bruit de papier de soi» alors qu'« un fil de Iarmes ficelle mes paupieres». A son point Ie plus haut, l'algebre se fait poesie et les...