Ecrire dans la maison du père: L’Emergence du féminin dans la tradition littéraire du Québec by Patricia Smart (review)

218 LETTERS IN CANADA 1988 ou encore dans quelle mesure ces origines ont-elles fa<.;onne les textes du poete? A l'exception de l'analogie que developpe Rene Garneau en 1956, Parizeau ne peut accepter les mises en rapport que l'on effectuera par la suite entre Ie continent americain et la poesie de Grandbois, car, selon lui, la geographie qui s'y deploie n'est d'aucun pays, mais d'un ailleurs produit de l'imaginaire, d'un 'reel au-dela du reel.' Et s'il fallait mettre au jour les traces d'une filiation dans la poesie de Grandbois, il y aurait sans doute lieu de tourner son regard vers cet autre territoire que constitue Ie Texte poetique, patiemment elabore par des generations de poetes parmi lesquels, l'on peut en etre sur, Grandbois a decouvert ses premiers modeles. Moderne, la conception de la poesie qU'emprunte Parizeau I'est incontestablement, comme I'est celle que pratique Grandbois. A l'aise avec Mallarme, il l'est toutefous beaucoup moins avec les Surrealistes, trop radicaux a ses yeux. Pourtant, ont-ils fait autre chose que de radicaliser la position de Mallarme? C'est que Parizeau ne peut pas admettre que la raison puisse abandonner son droit de regard. Aussi n'est-ce pas la la trace meme d'une difficile conciliation entre une pensee d'inspiration grecque fondee sur la clarte deja raison et une poetique qui la combat? (FRAN~OIS GALLAYS) Patricia Smart. Ecrire dans la maison du pere: L'Emergence du feminin dans la tradition litteraire du Quebec QuebedAmerique. 337. $23.95 broche Dans cette analyse qui porte sur plusieurs textes majeurs du XIxe et du xxe siecle, Patricia Smart offre une relecture remarquable des discours de I'homme et de la femme (et, par consequent, sur eux) dans la litterature quebecoise. L'element catalyseur de cette refiexion, ecrit l'auteure, ce fut que, commen<.;ant a lire des textes quebecois en tant que femme plut6t qu'en 'lecteur universel,' 'toute une triste cohorte de femmes tuees [lui] apparut.' L'ere du soup<.;on venait de s'ouvrir: si tout l'edifice, toute la Maison du pere s'etait elevee sur Ie refus, la reification ou Ie meurtre de la femme? Et si, parallelement a la voix de I'homme, il y avait une voix de femme que I'institution aurait sans cesse tue? Angelinede Montbrun, Ie premier des textes etudies, illustre magnifiquement cette question. Car, de constater Smart, 'Ia reponse critique au roman est en elle-meme un exemple de la fa<.;on dont l'appareil culturel de la societe patriarcale peut vider l'ecriture des femmes de son contenu subversif.' En considerant la parole d'Angeline comme 'angelique' (Casgrain), 'malsaine' (Le Moine) ou 'nefaste' (Ethier Blais), nul n'a vraiment fait apparaitre comment Ie 'je' feminin accede a la parole. A cette fin, Ie recours aux formesepistolaires ou du journal intime est tres HUMANITIES 219 significatif: fragmentation de l'univers male, stable et coherent, Ie journal tout particulierement permet a Angeline de s'ecrire comme femme. A cote de son histoire alui, s'ecrit, se vit son histoir~ aelle. Trente arpents, Le Survenant, la poesie de Saint-Denys Garneau et d'Anne Hebert, Bonheur d'occasion, Neige noire et l'oeuvre de France Theoret sont abordes avec la meme originalite et la meme perspicacite. Dans chaque cas, des lumieres nouvelles sur les oeuvres contribuent a placer cette etude dans une niche apart. Toutefois, selon Smart, c'est Bonheur d'occasion qui doit eire marquee d'une pierre blanche: les aleas qu'elle a connus font comprendre aFlorentine toute la signification de son destin de femme, et sa prise de conscience peut etre consideree 'comme un point tournant dans I'histoire du personnage feminin quebecois.' Tous ces textes qu'elle etudie, Smart les considere comme un microcosme culturel ou chacun des personnages feminins qui s'y debat fait partie d'une meme grande famille: 'Tous, dirait-on, ont grandi dans une meme maison, ou sous Ie regard du Pere severe, les fils se sacrifient ou s'endurcissent a leur tour, tandis que les filles resistent, sachant comme par un instinct sur que c'est a leur emprisonnement dans l'Image-Mere que Ie systeme doit sa perpetuite.' La methode employee par l'auteure se resume en un mot: l'intelligence. Chaque oeuvre est exploree avec tout Ie respect du asa singularite et, si Ie present compte rendu manque de nuances, l'ecriture de Smart, elle, ne simplifie ni ne caricature les problemes: 'Les oeuvres d'art ne sont pas des messages ideologiques, mais des explorations de la contradiction.' Le choix des oeuvres, pour sa part, est excellent en ce qu'il s'agit de textes majeurs, commentes aI'envi, et sur lesquels Smart projette malgre cela de nouvelles lumieres. En fait, il n'y a qu'un roman dont il m'a semble qu'll aurait pu figurer de maniere avantageuse dans ce parcours: Poussiere sur la ville. II aurait ete interessant de prendre connaissance des propos de Smart sur cette oeuvre qui est ala fois l'aboutissement ultime du discours male, et Ie point de depart d'un nouveau discours feminine Ecrire dans la maison du pere: un prix du Gouverneur general merite, parce qu'll s'agit en I'occurrence d'une etude ou, a chaque page, surgissent de nouvelles interpretations litteraires toutes riches en resonances humaines. 'La litterature, c'est la vie' ecrivait Du Bos; la critique aussi, quand elle etale une lecture intelligente dans un langage accessible. (PIERRE HEBERT) Jars Balan and Yuri Klynovy, editors. Yarmarok: Ukrainian Writing in Canada since the Second World War Canadian Institute ofUkrainian Studies, University ofAlberta 1987. x, 352. $24.95 Who does belong to Ukrainian literature in Canada? The answer is simple ...