In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Jeanne Moreau, image de «femme moderne» au tournant des années 60 Geneviève Sellier « "W" A PRÉSENCE DE JEANNE MOREAU est complexe et explosive. I Elle sait ne rien faire; elle sait servir ses partenaires; elle a cette chose JL-^rarissime: de l'aura»1. Cette appréciation sans précédent de l'hebdomadaire populaire Cinémonde en juin 1958 marque le changement de statut de l'actrice après la sortie d'Ascenseur pour l'échafaud en janvier 1958. Ce film est considéré communément comme celui qui inaugure la Nouvelle Vague au sens large, c'est-à -dire l'arrivée d'une nouvelle génération qui impose une façon nouvelle de faire du cinéma, plus personnelle, plus libre techniquement et esthétiquement, moins chère et donc moins soumise aux dictats des producteurs et des distributeurs. L'aide des pouvoirs publics à travers l'instauration de l'avance sur recettes en 1959 va lui permettre de s'institutionnaliser sous la forme de ce que nous appelons aujourd'hui le cinéma d'auteur. Parmi les jeunes acteurs qui accompagnent la Nouvelle Vague beaucoup naissent avec elle, comme Jean-Louis Trintignant, Jean-Claude Brialy, Bernadette Lafont ou Anna Karina. D'autres connaissent le succès grâce au nouveau cinéma mais deviendront ensuite des stars du cinéma populaire, comme Jean-Paul Belmondo. D'autres enfin jouissaient déjà d'une notoriété dans le cinéma populaire des années cinquante. C'est le cas de Maurice Ronet, Brigitte Bardot et Jeanne Moreau2. Jeanne Moreau devient une star avec la Nouvelle Vague, au sens économique et médiatique du terme, et son nom sera associé désormais au cinéma d'auteur, malgré une carrière antérieure assez longue dans le cinéma populaire (20 films). Son image change de nature en changeant de cinéma. La mutation s'opère entre 1958 et 1962, au cours d'une période faste où tous les films dont elle est la vedette font événement. Après le prix Louis Delluc 1958 qu'obtient Ascenseur pour l'échafaud, le scandale qui marque la présentation des Amants au Festival de Venise, en septembre de la même année, installe la nouvelle image de l'actrice, associant érotisme et modernité. En septembre 1959, Les Liaisons dangeureuses provoque une polémique littéraire, morale et diplomatique, après la tentative du Quai d'Orsay d'interdire le film à l'exportation . Moderato cantabile est présenté en mai 1960 au Festival de Cannes, où Jeanne Moreau obtient le prix d'interprétation féminine, puis en AHe28 Spring 2002 Sellier magne le prix de la meilleure interprète étrangère. Sorti en juin 1960, Le Dialogue des Carmélites obtient le Grand prix de l'Office catholique international du cinéma. La Nuit (co-production franco-italienne) est présentée à Paris en février 1961 et obtient la même année l'Ours d'or du 11e festival de Berlin. Enfin Jules et Jim, sorti en janvier 1962 à Paris, recevra le prix de l'Académie du cinéma, le prix du Meilleur film français et Jeanne Moreau obtiendra le Grand prix d'interprétation féminine. La consécration est achevée. En 1958, la comédienne a déjà dix ans d'activités théâtrales et cinématographiques derrière elle. Après un an comme auditrice au Conservatoire, elle devient pensionnaire de la Comédie Française en 1947, où elle jouera dans 29 pièces en quatre ans. Dès 1951, elle quitte cette vénérable institution pour le Théâtre National Populaire de Jean Vilar, synonyme du renouveau théâtral de l'après-guerre, où elle devient la partenaire de Gérard Philippe. Puis à partir de 1953, elle tente l'aventure du théâtre privé, où elle enchaîne les créations les plus prestigieuses, de G. B. Shaw à Cocteau et Tennessee Williams, avec pour metteurs en scènes Fernand Ledoux, Jean Cocteau, Jean Marais et Peter Brook, et pour partenaires Pierre Blanchar, Suzanne Flon, Jean Marais et Marie Bell. Comme la...

pdf

Share