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Alger est-il un "lieu de mémoire"? En partant de Salut cousin! de Merzak AUouache Réda Bensmaïa Aujourd'hui tout se brouille, les frontières se déplacent, les catégories deviennent confuses. Les différences perdent leur encadrement; elles se démultiplient, elles se trouvent presque à l'état libre, disponibles pour la composition de nouvelles configurations, mouvantes, combinables et manipulables'. DANS L'INTRODUCTION DU LIVRE où elle se proposait d'analyser les différentes figures que prennent les catégories de race, de «genre», de génération et de lieux à l'âge de la globalisation, Emily Apter n'avait pas manqué de relever l'importance que certains «lieux»—et en particulier les villes—pouvaient jouer dans l'élaboration de l'«imaginaire» d'un peuple ou d'une nation2. C'est du reste, ce qui l'avait amené à donner une place tout à fait particulière au travail que Pierre Nora avait fait entre autre sur les villes, les monuments ou les sites en tant que «lieux de mémoire» français. En effet, après avoir rappelé la problématique générale qui présidait au choix des «sites» dans cette étude monumentale ellem ême, Emily Apter notait: Even the most recent volumes of Pierre Nora's richly textured Les lieux de mémoire, with their new historical attention to the mystificatory components of national identity, clumsily justify their choice not to include Algiers or Montréal as hauts-lieux, or psychotopographies worthy of revisionist nostalgia. (2, c'est moi qui souligne) Et de fait, si l'on se réfère au passage où Pierre Nora tente de rendre compte du rationnel des «choix» qui ont été faits pour sélectionner les fameux «lieux de mémoire», on constate que les «raisons» qu'il a mis en avant pour inclure certains «sites» et exclure des «lieux» comme Montréal, Londres ou Alger ne tombent pas du tout sous le sens! De quelque manière que l'on retourne les arguments qui sont présentés pour justifier les choix qui ont été faits, ils demeurent pour le moins problématiques. Mais c'est que comme le dit Pierre Nora, c'aurait été céder à un «vagabondage individuel et arbitraire» que de considérer Alger, Montréal ou Londres comme d'«authentiques» lieux de mémoire historiques ou comme «hauts lieux» culturels susceptibles de faire battre «le plus intensément le cœur de la France»: La série des hauts lieux pose un tout autre type de problèmes. Où admettra-t-on que bat le plus intensément le cœur de la France, en dehors du sien propre? La tentation était forte, ici, de 114 Fall 2001 Bensmaïa le laisser élire des lieux et des moments tout personnels, à charge de les armer d'une problématique historique, comme le fit d'une problématique géographique Michelet pour Ouessant et le cirque de Gavarnie. Ou encore de profiter de l'occasion pour introduire des lieux extra hexagonaux , comme Alger, Londres, Fort-de-France ou même Montréal, dont cette année voit précisément le trois cent cinquantième anniversaire de la fondation. À ce vagabondage individuel et arbitraire, on a préféré Γirrécusable de trois critères: la prégnance des grandes stratifications, l'homogénéité des échantillons—sites parlants, lieux lourds et monuments à volonté démonstrative , la sanction du regard collectif ou étranger1. Comme le remarque Emily Apter encore, même s'il est tout à fait possible par exemple de repérer ce que l'on pourrait appeler des «trous de mémoire» du même type dans l'histoire des Etats-Unis vis-à -vis de son passé «impérial»— Vietnam mais aussi Amérique latine («lieux de mémoire», soit dit en passant, qui attendent toujours d'être «abréagis» et «intégrés» dans l'histoire américaine )—, il est toujours surprenant de voir combien de tabous frappent encore tout ce qui a trait à l'histoire de la colonisation en Afrique, au Moyen-Orient, mais surtout le véritable «scotome» qui frappe l'histoire de la «guerre d'Alg érie». Et c'est...

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