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Avant-propos LES TEXTES QUI SUIVENT, originellement réunis dans le cadre d'une séance du colloque de Lexington, Kentucky en 1996,1 doivent inspirer une constatation simple mais lourde de questions potentielles: quoiqu'on aime à décrire les XVIIe et XVIIIe siècles comme un «âge d'or du spectacle», la plupart des manifestations du spectaculaire à l'époque sont en fait réprouvées: le titre de gloire de l'esthétique classique au théâtre est d'avoir censément évacué ce que le genre pouvait encore avoir d'«imparfait» et d'«excessif»—scories qui ont principalement trait à son aspect performatif, visuel et sensuel. Quant aux formes spectaculaires autres que le théâtre— fêtes, parades, entrées, carrousels, la liste est longue—elles sont victimes de multiples incompréhensions, déconsidérées en tant qu'expression des débordements de l'absolutisme louis-quatorzien, abusivement mises au compte du «baroque», bref, perdues dans un no man's land épistémique entre l'histoire sociale et politique, les beaux-arts, la littérature et le théâtre. Notre point de départ commun était donc de réfléchir sur les spectacles du Grand Siècle à l'extérieur des cadres traditionnels, de façon interdisciplinaire, et sans visée normative. Il en a résulté une moisson d'articles qui illustrent avec éclat à quel point le spectaculaire constitue une notion fertile pour l'étude de l'âge classique, en mettant en évidence l'immense variété—mais aussi l'unité—des modes du spectacle. On constate en effet que le goût du spectacle se manifeste partout, de la cour à la ville, des théâtres aux baraquements de la foire, et des boulevards de Paris aux «déserts» du Canada, et qu'il ne se limite pas au seul divertissement, puisqu'il s'investit aussi bien de dimensions sociales et politiques. On savait, depuis un fameux article de Barthes sur la dramaturgie de Baudelaire, que la théâtralité était une essence séparée de l'activité théâtrale; on comprend à présent que les limites traditionnellement assignées au théâtre sont bien trop étriquées pour rendre compte la pluralité de manifestations imbues de théâtralit é, et qu'il faut cesser de comprendre la formule de «grand théâtre du monde» métaphoriquement. Ne soyons pas surpris du fait que les travaux réunis ici ne s'intéressent pas à ce «théâtre classique» tant étudié—non pas d'ailleurs qu'il l'ait toujours été du point de vue du spectacle, puisque c'est presque exclusivement du point de vue littéraire qu'on l'envisage en général; il s'agissait plutôt de mettre en valeur la théâtralité dans tous ses états: les manifestations publiques organisées par le régime, parades et carrousels qui font de toute la ville une scène où Vol. XXXIX, No. 3 5 L'Esprit Créateur s'affirme le pouvoir royal (A. Jarrard); ce rituel ambigu de la vie mondaine, la promenade, où «mise en scène» et «costume» prennent des acceptions inédites, mais finalement proches de celles usitées au théâtre (E. Kugler); l'utilisation des bijoux comme accessoires indispensables de la représentation royale, aussi bien du point de vue picmral que discursif, sur le thème de l'enchantement féerique (D. Course); une bien improbable entrée triomphale démarquée des fêtes de cour, mais jouée, à la limite de Γ auto-parodie, par de hardis colons dans les eaux glaciales d'une baie canadienne (B. Andres); les premiers spectacles donnés à la foire, fantaisies mythologiques pimentées d'acrobaties où l'on retrouve l'esthétique du divertissement curial (B. Russell), et ceux qu'influenc èrent la mode orientaliste, où les jeux de miroirs nous rappellent qu'une seule syllabe distingue «spéculaire» de «spectaculaire» (I. Martin); la comédie larmoyante enfin, genre méprisé entre tous par l'histoire et la critique dramatique , mais qui osa porter à la scène ce qui pouvait sembler le moins propre à être mis en spectacle: l'intimité domestique (D. Steinberger). Ces remarquables exemples de l'étendue...

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