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  • La ville charitable. Les œuvres sociales catholiques en France et en Allemagne au XIXe siècle by Catherine Maurer
  • Axelle Brodiez-Dolino
Catherine Maurer . - La ville charitable. Les œuvres sociales catholiques en France et en Allemagne au XIXe siècle. Paris, Le Cerf, 2012, 411 pages.

Spécialiste des œuvres catholiques allemandes au XIXe et dans la première moitié du XXe siècle, Catherine Maurer livre ici le fruit de son mémoire d'habilitation sur « les catholiques et la demande sociale urbaine ». Alors que la Caritas allemande, étudiée dans sa thèse, est restée une centrale catholique de charité, le parti pris explicite ici est de voir ce qui se joue non « au sommet » des œuvres, mais sur le terrain. Il s'agit également d'un travail comparatiste d'« histoire croisée » entre la France et l'Allemagne. Enfin, la démarche se veut à l'interface des histoires religieuse et urbaine, jonction longtemps restée « point aveugle de l'historiographie » (Michel Lagrée) et sur laquelle les travaux commencent à se développer depuis une quinzaine d'années.

La principale source est constituée par les répertoires d'œuvres catholiques, exercice en vogue entre le milieu du XIXe et le début du XXe siècle. Huit villes françaises ont été retenues (Angers, Elbeuf, Lyon, Nancy, Neuilly, Orléans, Rouen et Saint-Étienne) ainsi que sept villes allemandes (Berlin, Bochum, Breslau, Cologne, Francfort, Königsberg et Wurtzbourg), auxquelles s'ajoute le cas spécifique de Strasbourg, ville franco-allemande où réside l'auteure, qui a fait l'objet d'investigations archivistiques plus approfondies. L'ouvrage se compose de quatre grandes parties.

D'abord, l'examen du contexte de production de ces répertoires caritatifs, dans le cadre d'un développement des enquêtes et des statistiques depuis la fin du XVIIIe siècle, puis des enquêtes sociales, notamment catholiques, à partir des années 1820 - l'Allemagne restant sur ce dernier point très en retrait par rapport à la France et à l'Angleterre. En 1848, l'archevêque de Paris crée une Association générale de charité, pour « coordonner et étendre la charité chrétienne » ; un premier manuel d'œuvres est rédigé en 1852. Le corpus français date toutefois surtout des années 1880-1905, alors que se multiplient les œuvres charitables et que se joue une concurrence nouvelle avec le pouvoir républicain, aux niveaux national et municipal. « Les enquêtes sur les œuvres peuvent dès lors être lues comme une riposte des catholiques, en un temps où leurs positions semblent menacées » (p. 39). Leur écriture est historique et méthodique, voire « préscientifique », témoignant par là [End Page 108] d'une certaine « modernité intellectuelle » (p. 49). Les ouvrages sont structurés par publics aidés (âges, types de besoins...) et modalités d'intervention ; le lectorat ciblé est principalement l'élite catholique, soutien financier et organisationnel des œuvres.

Les enquêtes allemandes ne se développent que dans un second temps, à partir des années 1890 ; elles dépassent souvent le cadre de la ville pour s'étendre au diocèse. Les deux ouvrages matriciels portent sur Vienne (par Heinrich Pesch, jésuite et futur théoricien du solidarisme) et Cologne (par Max Brandts, membre des conférences de Saint-Vincent-de-Paul, en réponse à la concurrence des assistances protestante et municipale). Parallèlement, le Caritasverband, fondé à Cologne en 1897, développe un travail de coordination des œuvres, d'information et d'enquête. Ce décalage temporel entre les deux pays est également visible dans les dates de créations d'œuvres, dont l'auteure propose d'intéressants graphiques synoptiques et qu'elle explique par les chronologies différenciées de l'industrialisation et de l'urbanisation, des réveils religieux et des dynamiques congréganistes, des contextes législatifs et politiques envers les œuvres et les Églises.

La deuxième partie traite de la naissance des œuvres, avec trois configurations. Dans les cas de création par des laïcs, que la démarche soit individuelle ou collective/ associative, les...

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