In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

  • Home Words:Maisons, liens familiaux et affinités électives dans le roman québécois pour adolescents
  • Claire Le Brun (bio)

On ne sort pas intact de la lecture de Home Words, tant le concept de home, abordé dans ses multiples acceptions, et par rapport aux non moins multiples contraires auxquels il s'oppose, et qu'il définit de cette façon, ne peut manquer de questionner le chercheur universitaire sur sa vision du monde, sur le système d'inclusion/exclusion (ici/ailleurs, soi/autre, etc.) sur lequel reposent ses propres jugements et travaux. L'examen auquel Perry Nodelman soumet sa démarche de chercheur non-amérindien évaluant des fictions sur les Amérindiens est exemplaire à cet égard. Après avoir pris connaissance de la table des matières, c'est avec grand intérêt que j'ai accepté de confronter les analyses du recueil à un corpus québécois récent. Je commencerai par quelques commentaires d'ensemble, notamment sur les approches théoriques les plus utilisées.

Dans sa contribution « métacritique » au recueil, Neil Besner constate que les méthodes d'analyse utilisées en littérature jeunesse reflètent bien les approches actuellement dominantes dans la lecture de la littérature canadienne anglaise pour adultes. Cette observation vaut aussi pour le Québec. Les méthodes sont-elles les mêmes qu'au Canada anglais? Oui et non, ou pas tout à fait. Malgré une évidente circulation des idées dans la sphère universitaire, quelle que soit la langue officielle dans laquelle elles s'expriment, le travail de l'équipe de recherche de Winnipeg, si on le compare à des recueils d'études récents sur la littérature jeunesse québécoise, choisit des cadres théoriques légèrement différents. Ainsi les études post-coloniales, qui me semblent être une des bases théoriques les plus importantes du recueil—en permettant notamment un dialogue fructueux avec la recherche australienne—trouvent plutôt leur pendant au Québec dans une problématique d'écriture migrante et de métissage (voir, par exemple, Sorin). On sait aussi que le discours institutionnel et pédagogique du Québec préfère le concept d'interculturel à celui de multiculturalisme, sur lequel se centre l'article [End Page 112] de Louise Saldanha. Par ailleurs, comme l'a rappelé Danielle Thaler, la littérature jeunesse canadienne-française est plus jeune que sa voisine canadienne-anglaise. Née au début des années 1920, elle n'offre aucun aperçu sur les mentalités du dix-neuvième ou du début du vingtième siècle, comme le font l'œuvre de Catharine Parr Trail et celle de Lucy Maud Montgomery. On y cherchera vainement ces robinsonnades dans lesquelles Andrew O'Malley observe le pouvoir de la domesticity. Détail significatif et qui montre à l'évidence l'écart entre les deux histoires politiques: le premier roman pour la jeunesse, Les aventures de Perrine et de Charlot dans la Nouvelle-France de Marie-Claire Daveluy, est à la fois récit de colonisation et roman historique! Dans la littérature jeunesse de chacune des cultures, les mythes de fondation sont posés de façon bien différente. Néanmoins, il serait intéressant, dans des études ultérieures, de voir dans quelle mesure ce concept de domesticity pourrait s'appliquer à la saga de Marie-Claire Daveluy (1921-40). Dernière remarque, les études féministes, fort utilisées dans l'interprétation des textes québécois, notamment par Daniela Di Cecco et Lucie Guillemette, ne semblent pas avoir inspiré la réflexion de l'équipe.

Une même présence semble hanter les littératures des « Deux Solitudes », qu'elles s'adressent aux adultes ou aux enfants, c'est celle de l'Amérindien. Les chapitres de Perry Nodelman d'une part et de Doris Wolf et Paul DePasquale d'autre part apportent donc matière à une riche réflexion. Ils seront dorénavant une référence obligée de tout travail sur le personnage de l'Amérindien en littérature jeunesse. Toutefois, comme l'article de Danielle Thaler aborde le sujet...

pdf

Share