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  • Traduire en français à l’âge classique: génie national et génie des langues ed. by Yen-Mai Tran-Gervat
  • Jean-Alexandre Perras
Traduire en français à l’âge classique: génie national et génie des langues. Edité par Yen-Mai Tran-Gervat. Paris: Presses Sorbonne Nouvelle, 2013. 216pp.

Cet ouvrage collectif fait suite à un colloque qui a eu lieu en Sorbonne en 2011. Il s’inscrit plus généralement dans le cadre d’un projet soutenu par Agence Nationale de la Recherche sur l’‘Histoire des traductions en langue française’. Un premier volume consacré aux enjeux de la traduction française au dix-neuvième siècle est paru chez Verdier en 2012. Le présent ouvrage constitue un prélude au prochain volume annoncé chez le même éditeur et qui concernera la traduction aux dix-septième et dix-huitième siècles. Ce sont ici les questions littéraires entourant la traduction qui sont privilégiées. En s’inscrivant dans la lignée des travaux de Roger Zuber et de Gilles Siouffi, les textes réunis s’intéressent tant à l’histoire de la traduction qu’à celle des notions de ‘génie’ de la langue et de ‘génie’ national. Le principal mérite de cet ouvrage est justement d’inviter à repenser de manière critique ce qui unit ces deux histoires à l’âge classique. Cette invitation se veut d’emblée polémique. Il s’agit en particulier de ‘nuancer les idées reçues’ autour des ‘belles infidèles’ et du ‘génie français’, en remettant en cause ‘le complexe de supériorité des traducteurs français, et la désinvolture des “belles infidèles” à l’égard de leur original, sous le prétexte un peu trop simple de servir le “génie français” ou le “génie de la langue française”’ (p. 8). Pour ce faire, ce collectif favorise la pluralité des points de vue et accorde une place privilégiée aux écarts et aux dissonances face à l’apparente univocité du discours classique sur la langue française et sa précellence. La complexité des conceptions de la traduction en français à l’âge classique est mise en évidence par les deux articles liminaires, qui cherchent à présenter une mise au point théorique du ‘contexte idéologique’ de ce que l’on entendait par le ‘génie’ des langues et des peuples. Un parcours chronologique en deux parties suit cette mise au point théorique, en s’intéressant aux relations des traducteurs, d’une part avec les langues anciennes, et d’autre part avec les langues vernaculaires européennes. Le corpus analysé par les auteurs n’implique pas exclusivement le domaine français, et inclut entre autres des perspectives suisses ou polonaises dans le débat. Les auteurs des articles s’emploient dans l’ensemble à l’exposition d’un corpus ou d’un traducteur particuliers, à partir desquels ils soulignent, de façon parfois inégale, la complexité des enjeux traductologiques de l’époque, comme la porosité des frontières entre traduction, imitation et création, les fluctuations des ‘bienséances’, les stratégies déployées pour acclimater l’intraduisible, etc. Au fil de ces articles apparaît en particulier la productive relativité de la notion de ‘génie’, dont la valeur sert non tant à instituer des hiérarchies qu’à établir de la distance entre le texte de départ et le texte traduit, et dès lors, à fonder des particularités nationales et linguistiques. On peut espérer que le prochain volume à paraître aux éditions Verdier mettra en lumière les enjeux sociaux et politiques animant toutes ces traductions.

Jean-Alexandre Perras
Lady Margaret Hall, Oxford
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