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  • Trois romans d’Isabelle de Charrière: ‘Lettres neuchâteloises’; ‘Lettres de Lausanne’; ‘Honorine d’Userche’
  • Edward Ousselin
Isabelle De Charrière: Trois romans d’Isabelle de Charrière: ‘Lettres neuchâteloises’; ‘Lettres de Lausanne’; ‘Honorine d’Userche’. Présentation et notes d’Erik Leborgne. (Lire le dix-huitième siècle). Saint-Étienne: Publications de l’Université de Saint-Étienne, 2011. 253 pp.

Ces trois ‘romans’ (le dernier étant en fait une nouvelle) représentent trois étapes de la production littéraire d’Isabelle de Charrière. Les deux premiers sont des romans épistolaires, alors que le dernier est écrit à la troisième personne (mais inclut toutefois plusieurs lettres). L’ouvrage qui marque le véritable début de la carrière de l’auteure, les Lettres neuchâteloises, a été publié en 1784, lamême année que les Lettres de Mistriss Henley. L’édition présentée par Erik Leborgne inclut également Caliste (1787), la suite des Lettres de Lausanne (1785). Quant à la nouvelle Honorine d’Userche (initialement publiée en allemand en 1796), elle fait partie, avec Trois Femmes, Sainte Anne et Les Ruines de Yedburg, du recueil intitulé L’Abbé de La Tour. Leborgne a ainsi choisi, parmi les Œuvres complètes publiées de 1979 à 1984 en dix volumes (Amsterdam: van Oorschot), des textes qui reflètent la diversité stylistique et thématique des écrits de Charrière. Outre son introduction et ses notes, l’appareil critique fourni par Leborgne inclut un découpage des Lettres de Lausanne et de Caliste, des exemples de la réception critique d’Honorine d’Userche dans les revues allemandes, une chronologie de la vie de Charrière, ainsi qu’une bibliographie catégorisée. Dans son Introduction, Leborgne rappelle qu’il a eu d’abord pour souci d’éviter de cantonner l’œuvre et l’auteure dans la catégorie subalterne des ‘romans de femmes’, une appellation qui ‘constitue à la fois une impasse intellectuelle et un contre-sens de lecture’ (p. 7), et qui aboutit à ‘considérer les femmes comme des êtres d’une autre nature, pratiquant une littérature spécifique avec un mode d’expression particulier’ (pp. 7–8). Charrière doit au contraire être considérée comme une auteure à part entière, dans la lignée de ceux des Lumières, et qui ‘fut animée, comme les plus grands écrivains et philosophes de son siècle, par le souci de penser l’universel, à partir d’une analyse des rapports entre statut social, conditionnement psychologique et situation politique’ (p. 7). Ces trois facteurs sont en effet perceptibles dans chacun des textes que Leborgne a sélectionnés pour cet ouvrage. Dans les Lettres neuchâteloises, par exemple, la stratification sociale de l’Ancien Régime est incarnée par les personnages principaux: une jeune aristocrate, Marianne de la Prise (dont la fortune familiale est cependant ‘délabrée’); un bourgeois, Meyer, le fils d’un riche marchand; et la représentante du peuple, la jeune cousette Julianne. Les liens amoureux qui se tissent entre ces trois personnages dissemblables, ainsi que le renoncement par lequel se conclut l’intrigue, ont pour toile de fond une microsociété caractérisée par un traditionalisme mesquin et une certaine médiocrité intellectuelle. Pour Leborgne, le traitement des héroïnes dans les textes ultérieurs illustre ‘l’évolution historique et politique de l’auteure, qui émerge pleinement dans son œuvre après 1789’(p. 8). [End Page 101] Avec ce livre, Leborgne a rendu accessible (et à un prix abordable) à un plus grand public un choix de textes, représentatif et pertinent, qui figurent parmi les meilleurs romans et nouvelles d’une des auteures les plus importantes de sonépoque, mais trop longtemps déconsidérée et marginalisée du simple fait de son sexe.

Edward Ousselin
Western Washington University
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