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  • La Littérature face à elle-même: l'écriture spéculaire de Samuel Beckett
  • Matthijs Engelberts
La Littérature face à elle-même: l'écriture spéculaire de Samuel Beckett. Par Éric Wessler. (Faux titre, 339). Amsterdam: Rodopi, 2009. 461 pp. Pb €92.00; $129.00.

La question de cette étude n'est pas nouvelle mais reste intéressante: comment considérer le fait que les textes de Beckett contiennent souvent un double d'eux-mêmes et réfléchissent leur propre production? L'ouvrage décline cette question de différentes façons. Il entend retracer l'histoire des procédés autoréflexifs, ensuite expliquer historiquement l'importance contemporaine de l'autoréflexivité par l'autonomisation de la littérature. Puis il traite le rapport au monde et au sujet chez Beckett et veut finalement mettre en relief la place centrale de la mélancolie pour le sujet beckettien. Vaste programme. Louons l'effort de préciser le grand nombre de termes qui servent àdésigner 'l'écriture spéculaire': réflexivité, autoréflexivité, autoreprésentation, autoréférence, mise en abyme, métathéatre ou métafiction. Les vingt pages d'une introduction qui en compte trente citent un nombre impressionnant d'ouvrages critiques (sans distinguer le degré d'importance des nombreuses études), mais il est décevant de lire àla fin de ce parcours, dans une étude généralement bien écrite: 'Il est donc inutile de déduire une nouvelle grille d'emploi des termes évoqués: chacun possède une spécificité qu'on ne saurait lui retirer, car il ne s'agit ici que des plus généralement usités' (p. 41). Faut-il nécessairement une grille pour arriver à un emploi précis de termes? S'agirait-il d'ailleurs d'une nouvelle grille (le texte n'en donne pas d'anciennes)? Et est-ce parce que les termes sont d'un emploi courant qu'ils ont une 'spécificité'? L'étude propose ensuite une histoire de la spécularité dans le théâtre et dans le roman, où le lecteur va du théâtre antique et de l'Odyssée à Virgile, à Dante, au théâtre baroque, au romantisme et au-delà, sans perdre de vue Beckett. Une question qu'on pourrait poser ici est si, dans l'étude (une thèse de l'université de Strasbourg), la spécularité est considérée comme un 'élément de permanence', comme le suggère la conclusion par exemple, ou comme un phénomène qui marque surtout le modernisme et le postmodernisme, comme le dit le critique ailleurs. L'auteur répondrait sans doute qu'il s'agit d'un 'mouvement toujours plus autoréférentiel de la tradition littéraire' (p. 189 — disons d'ailleurs plutôt d'une certaine tradition littéraire), mais cela cadre mal avec d'autres assertions passablement péremptoires — 'une pièce de théâtre se dévoile toujours comme du théâtre' (p. 50). L'autonomie de la littérature (3e partie) est un sujet pertinent pour la réflexivité, mais elle a fait l'objet de plusieurs théories et il est dangereux de consacrer l'introduction de cette partie de l'ouvrage à Adorno tandis qu'un Luhmann n'est cité plus tard que dans une note. Il faut évidemment se rendre compte que l'ouvrage se veut principalement une contribution à la critique beckettienne et que l'auteur se distingue par ses connaissances de Beckett et de la critique beckettienne, tant anglophone que francophone. Notons toutefois aussi que l'étude contient des analyses détaillées d'une dizaine de textes de Beckett, dont six pièces de théâtre courtes (ces choix ne sont pas motivés), et que ces analyses ne semblent pas profiter autant qu'on pourrait le souhaiter de l'appareillage théorique et historique. Bref, sujet extrêmement intéressant, thèse [End Page 267] bien écrite et qui fait souvent preuve de solides connaissances; mais pour une étude critique il aurait sans doute été préférable de choisir une approche qui permette de limiter l'angle et d'arriver ainsi àun...

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