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  • 'Atala'; René'; 'Les Aventures du dernier Abencerage' de Chateaubriand
  • Jean Balcou
'Atala'; René'; 'Les Aventures du dernier Abencerage' de Chateaubriand. Par François Mouttapa. (Foliothèque, 163). Paris: Gallimard, 2009. 271 pp. Pb €8.20.

Le propre de cette collection à visée pédagogique est de faire suivre l'analyse d'une œuvre annotée de références et illustrée de tableaux accompagnateurs par un dossier des différentes formes de sa réception. François Mouttapa s'est livré en orfèvre à cet exercice en étudiant l'ensemble des trois romans de Chateaubriand Atala, René, Le Dernier Abencerage, d'après l'édition de Pierre Moreau parue en 1978. L'auteur lui-même les avait regroupés en 1826, mais sans qu'on connaisse le troisième texte resté depuis sa rédaction en 1807-10 inédit jusque-là. A partir de ce qu'il nomme le 'diptyque existant' Atala-René, le critique en arrive avec l'Abencerage à un triptyque qui devient dans l'aventure littéraire de l'auteur une véritable 'trilogie' (pp. 9-15). Ce que l'analyse va excellemment développer sur la triple thématique des figures de la mélancolie, des jeux du 'roman paysage' et des 'miroirs de l'Histoire'. Dès lors on voit l'Abencerage prendre la première place, car en lui semble se cristalliser les données précédentes et se résoudre la question du salut consolateur dans la récupération de l'âge de la chevalerie préexistant à la monarchie absolue (pp. 166 -94). Les brillants aperçus du critique eussent gagné à recourir particulièrement pour René aux variantes de 1805, qui portent sur le héros un éclairage saisissant. Mais se pose plus que jamais, depuis l'intégration établie par J.-C. Berchet d'Atala-René dans la saga des Natchez (Le Livre de poche, 1989), la question non envisagée par P. Moreau que suit F. Mouttapa, de la réelle autonomie de René. Il est vrai que Chateaubriand lui-même l'avait voulu [End Page 103] ainsi en 1826, mais en même temps il publiait sa version des Natchez. On voit bien comme il est difficile de rester dans les limites imposées tant René l'irrécupérable, trop décentré ici, fait tout exploser. Le dossier qui suit n'en devient que plus excitant. Car si richement documenté qu'il soit, il ne sera jamais (heureusement) exhaustif. Le mal du siècle, qui est le mal du dix-huitième siècle (René arrive en Louisiane en 1725) avant de devenir celui du dix-neuvième puis celui de toute sécularisation quand on fait partie d'une génération perdue (la 'génération-guillotine' pour Chateaubriand), produit une telle postérité! Regrettons pourtant que dans la série 'récritures' manque Flaubert, qui dans Par les champs et par les grèves termine son périple breton de 1847 par Saint-Malo et Combourg, où il joue littéralement à ce René qui l'étreint au point de vouloir s'en désencombrer. Si, par ailleurs, l'étude si revigorante de Pierre Barbéris René' de Chateaubriand: un nouveau roman (Paris: Larousse, 1973) devait être rappelée, il n'en demeure pas moins que le passage choisi était à redresser où l'auteur distord le texte en remplaçant 'les mois des tempêtes' par 'le mois de brumaire' pour nous faire avaler son idéologie. Les références ne doivent-elles pas être soumises à la critique? Profitons enfin de ce compte rendu pour rappeler que le grand livre sur la mélancolie demeure celui de Burton et que pour la littérature descriptive la longue étude de Alexander von Humboldt dans Cosmos est exceptionnelle. Les réactions que suscite ici l'ouvrage de F. Mouttapa ne doivent pas faire oublier, bien au contraire, combien son ouvrage est novateur et indispensable pour une meilleure connaissance de 'Chateaubriand romancier'.

Jean Balcou
Université de Bretagne Occidentale
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