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  • Ovide savant, Ovide galant: Ovide en France dans la seconde moitié du XVIIe siècle
  • Sophie Rollin
Ovide savant, Ovide galant: Ovide en France dans la seconde moitié du XVIIe siècle. Par M.-C. Chatelain. Paris, Champion. 2008. 763 pp. Hb €125.00.

Ovide est, à l’âge classique, un des fondements de l’apprentissage des Humanités et un point d’ancrage dans la culture des Lettrés. Mais, en analysant sa réception, Marie-Claire Chatelain démontre que, au cours du XVIIe siècle, l’intérêt s’est porté sur différentes parties de son œuvre, tandis que son imitation était modulée par l’émergence d’une esthétique moderne. La première moitié du siècle, héritière d’une tradition humaniste, envisage Ovide comme une source de connaissances et privilégie la lecture des Métamorphoses auxquelles on prête une valeur exemplaire. L’œuvre complète d’Ovide fait l’objet d’éditions savantes, comme celle de Nicolas Heinsius (1652) et de traductions accompagnées de commentaires érudits (Nicolas Renouard, 1609; Du Ryer, 1655). A partir de 1650, le courant moderne critique la lecture allégorique des fables au nom de la raison et privilégie l’expression du sentiment. Cependant, il n’y aura pas de querelle des Anciens contre les Modernes à propos d’Ovide car, tandis que la démarche savante est peu à peu délaissée au profit de la lecture des textes pour eux-mêmes, ses œuvres amoureuses suscitent un nouvel engouement. A l’‘Ovide savant’, succède donc un ‘Ovide galant’ prisé par des auteurs qui cherchent moins à imiter la matière de ses écrits qu’à s’approprier sa manière et l’esprit des Amatoria. La deuxième et la troisième partie de l’ouvrage montrent que Ovide fait alors l’objet d’une imitation libre, infléchie par l’essor d’une esthétique galante, puis par celui de la veine élégiaque. Dans le registre galant, Bussy s’inspire de la sentence ovidienne dans ses Maximes d’amour (1663) mais, à l’opposé des artifices préconisés par son modèle, il exalte un sentiment sincère. Dans ses Métamorphoses d’Ovide en rondeaux (1676), Benserade renonce à l’ampleur et à la grandeur épiques de son modèle en traitant les fables sous la forme ramassée du rondeau et en abaissant leur style vers un burlesque léger. Il compose ainsi des fables galantes alliant une inspiration ovidienne et ésopique. La Fontaine, enfin, puise à son gré dans toutes les parties de l’œuvre d’Ovide et développe une poétique de l’enchantement en tempérant le style enjoué par une veine élégiaque. Autour de 1660, en effet, le renversement de l’esthétique madrigalesque vers une esthétique déplorative renouvelle l’intérêt pour les œuvres élégiaques d’Ovide. Le souvenir des Héroïdes et des Amours transparaît dans les Lettres portugaises (1669) à travers la forme de la lettre amoureuse et de l’épître élégiaque, mais aussi dans une représentation héroïque et tragique de l’amour. De même, c’est peut-être l’influence de la poétique ovidienne qui oriente les tragédies raciniennes vers le pathétique. L’émotion tragique repose alors moins sur les ressorts aristotéliciens de la terreur et de la pitié que sur une recherche de l’attendrissement. En définitive, Marie-Claire Chatelain démontre que ces auteurs subvertissent l’œuvre d’Ovide, tout en demeurant fidèles à l’esprit qui l’anime. Ils se détournent de la grandeur du merveilleux des fables mais renouent avec une poétique ovidienne de la douceur en développant un nouveau lyrisme, plus familier qui rejoint le sublime par la grâce et la simplicité d’une expression qui tend vers la naturel.

Sophie Rollin
University of Durham
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