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  • Porous Boundaries: Texts and Images in Twentieth-Century French Culture
  • Hugues Azérad
Porous Boundaries: Texts and Images in Twentieth-Century French Culture. Édité par Jérôme Game. (Modern French Identities, 44). Bern: Peter Lang, 2007. 164 pp. Pb €30.00; £27.00; $46.95.

‘To become art, art requires something that is heterogeneous to it’ (p. 66): cet aphorisme d’Adorno, cité et exploré magistralement par Marie-Claire Ropars, résume parfaitement l’enjeu majeur soulevé par cet ouvrage collectif. Bien plus qu’une énième publication sur le dialogue entre les arts, ce livre remet à plat les problèmes fondamentaux que suscite le frottement souvent abrasif entre les pratiques artistiques majeures: littérature, peinture, poésie, cinéma, sculpture, etc. Ces rencontres relèvent principalement de deux modes d’agencement: l’hybride (‘bringing difference into an individual form’) et l’hétérogène (‘bringing about difference from an individual form’, p. 11); ce sont aussi les deux façons dont l’identité de chaque art peut être différenciée ou altérée. Jérôme Game tisse finement ce qu’il appelle une ‘généalogie’ de la porosité de [End Page 564] la frontière logique qui sépare altérité et différence, et qui fait que les pratiques textuelles et visuelles examinées dans ce livre sont perçues sous l’angle de la relation et non de la substance. Plusieurs chapitres se penchent sur des cas limites, des œuvres extrêmes qui n’en sont pas moins emblématiques de cette porosité entre les arts, où chaque pratique artistique se trouve remise en cause, déviée, au contact de l’autre, mais pour se recentrer sur ce qui serait la recherche profonde, l’infinie réserve de certaines œuvres de la (post)modernité. C’est ce que fait, par exemple, l’article séminal de Jacques Rancière sur le travail de Marcel Broodthaers, dont l’œuvre–image du texte de Mallarmé Un coup de dés jamais n’abolira le hasard détourne, mais pour mieux concentrer, l’enjeu esthétique de Mallarmé: c’est pourquoi Broodthaers met le poème dans un étau dont chaque mors représente les deux extrêmes du texte mallarméen: des mots sans espace et un espace sans mots. Le ‘dispositif ’ de Broodthaers est légitimé par son approfondissement de l’économie et de l’esthétique, notions que Rancière a su déceler chez Mallarmé et qui livre là un de ses écrits les plus profonds et énigmatiques: le poème comme son image sont bien cette ‘chorégraphie entre le texte et ses lecteurs’ (p. 47). L’article de Marie-Claire Ropars sur la réécriture filmique d’Aurélia Steiner par Duras, ainsi que ceux de Raymond Bellour sur un CD-ROM sur Rousseau, de Nathalie Wourm sur la nouvelle poésie filmique (Alferi, Chaton), de Timothy Mathews sur Bacon et Giacometti, de Jean-Michel Rey sur la scénographie des expositions, rivalisent d’acuité analytique et permettent à la fois de saisir l’enjeu de chaque ‘moment’ hybride ou hétérogène offert par ces œuvres, et d’extirper des lois et des dynamiques radicalement novatrices: l’intermédialité se traduit en un mouvement vertigineux où c’est plutôt la rencontre entre la critique et l’œuvre — et par critique il faut entendre interprétation philosophique, littéraire et théorique — qui prévaut et crée, littéralement, une porosité entre pratiques artistiques et disciplines théoriques. Game orchestre là une réflexion particulièrement riche, où les voix exceptionnelles de critiques, universitaires et praticiens des arts, nous font voir, sentir et comprendre ce que l’interaction entre les arts peut produire de nouveau: l’hétérogène est bien ce qui révèle l’art — sa spécificité — à lui-même.

Hugues Azérad
Magdalene College, Cambridge
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