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  • Mythologie de la Chauve-SourisLe Vampire et ses avatars chez Baudelaire et Barbey D'Aurevilly
  • Maya Hadeh

Si l'apparition du vampire remonte aux temps de l'antiquité grecque avec les lamies et si elle se présente dans les légendes celtiques à travers les Droch-Fhola ou les démons buveurs du sang, il faut attendre l'époque romantique pour que le vampire, et d'abord ses représentations féminines, trouve une place plus éminente dans la littérature. Désormais, les récits de Lord Byron, John Polidori, Sheridan Le Fanu, Barbey D'Aurevilly, Keats, Nodier, Baudelaire, Gautier et bien sûr Bram Stoker avec son Dracula, publié en 1897, contribuent à établir un mythe littéraire du vampire.

Or, le surgissement de la littérature vampirique dans la France du XIXe siècle n'est pas le fruit du hasard. Car, conscient de la réalité tragique de l'Histoire après la Révolution française et voulant rompre avec les illusions intrinsèques de la nature humaine, les écrivains de ce temps mettent l'accent dans leurs écrits sur les paradoxes et la violence d'une époque où, contrairement au temps de Rousseau, l'homme se trouve "[. . .] semblable et égal à l'homme, c'est-à-dire toujours à l'état sauvage"1 si l'on se réfère aux journaux intimes de Baudelaire. Ainsi, la nature n'est plus la confidente de l'homme, elle ne fait que des "monstres" et "[. . .] pousse l'homme à tuer son semblable, à le manger, à le séquestrer, à le torturer; [. . .], [elle] ne peut conseiller que le crime. . .."2 C'est dans cette atmosphère que le mythe du vampire trouve les prémices de son épanouissement. Assimilé à la chauve-souris, animal nocturne et répugnant, la figure mythique du vampire se caractérise par l'acte de la succion du sang qui assouvit son désir et contamine ses victimes.

Dans notre travail, nous proposons d'étudier les avatars du vampire [End Page 37] dans Une Vieille Maîtresse de Barbey D'Aurevilly et Les Fleurs du Mal de Baudelaire. Envisager les différentes représentations du vampire dans notre corpus nous permet de constater que le vampire est plutôt féminin que masculin. Or, c'est dans le personnage masculin que cette femme vampire trouve son unité et c'est en s'emparant de sa substance vitale qu'elle domine sa victime et la rend son double. Le sang est désacralisé, car contaminé, il est la nourriture qui assure la survie du vampire. Dans son livre Barbey d'Aurevilly et l'imagination, Philippe Berthier écrit: "[. . .] Le vampirisme n'a pas besoin chez Barbey de référence. Il s'impose en filigrane, bien sûr, mais singu-lièrement présent, comme l'aboutissement inévitable des fantasmes."3 Le vampirisme est un thème récurrent chez Barbey. Il apparaît déjà dans une nouvelle, écrite en 1832, Léa, "qui méritait bien de figurer dans les anthologies de la littérature vampirique"4 et où l'on voit une jeune fille mourir d'un baiser échangé avec Réginald, le vampire aux lèvres sanglantes.5 Cependant, nous remarquons que le vampire dans Une vieille maîtresse est doté d'un accent particulier: à l'instar du vampire mâle, le lecteur se trouve en face de la Vellini, la femme-vampire. Fatale et prédatrice, cette Malagaise répond en écho au vampire baudelairien, souvent féminisé sous la plume du poète. En effet, la femme-vampire hante l'univers des Fleurs du Mal et fait partie des monstres baudelairiens. Elle revêt plusieurs formes représentant à la fois le vampire sanguin et le vampire psychique.6

Représentations du Vampire

Ambivalent et polymorphe, le vampire comme toute figure mythique possède le privilège de l'ambiguïté. Dans Une vieille maîtresse, Vellini, est présentée comme un être dont l'identité pose problème:

Mais voyez-vous! La Vellini n'a pas d'analogue dans mon répertoire de souvenirs. On ne comprend rien à celle-là! C'est un logogriphe, c'est un hiéroglyphe, c'est un casse...

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