In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • L’Orient anglais: Connaissances et fictions au xviiie siècle by Claire Gallien
  • Florence D’Souza (bio)
L’Orient anglais: Connaissances et fictions au XVIIIe siècle par Claire Gallien Oxford: Voltaire Foundation, 2011. iv+245 pp. US$105; £60;€70. ISBN 978-0-7294-1023-6.

Cette étude solide et très bien documentée sur la représentation textuelle de l’Orient en Grande Bretagne au xviiie siècle se porte sur des textes non-fictifs de l’érudition orientaliste d’une part, et sur des textes littéraires de divers genres inspirés d’un orient imaginé, d’autre part. Partant d’une conception séparée des contes orientaux comme phénomène de mode pseudo-orientale en Angleterre, et des textes des savants orientalistes, tirés de chroniques historiques et des textes sacrés provenant de l’Orient réel, l’auteur tourne son attention aux emprunts et aux passerelles entre ces deux domaines de l’écriture, tout en tenant compte du contexte contemporain de la colonisation de l’Inde par la East India Company avec l’appui du gouvernement britannique de l’époque. Dans l’analyse de ces deux ensembles de textes anglais sur l’Orient, et allant à l’encontre de la théorie sur l’orientalisme selon Edward Said, Orientalism (1978), qui y perçoit un effort unilatéral des Occidentaux pour figer l’Orient en une image monolithique, infériorisante, Claire Gallien y trouve des instances d’opposition à la colonisation, des interrogations de la supériorité de l’Europe sur l’Orient, et une critique des préjugés sur les peuples orientaux alors en circulation en Europe.

Dans chapitre 1, intitulé « La Mode Orientale », l’auteur trace l’évolution des rapports du genre littéraire pseudo-oriental avec l’orientalisme sérieux entre 1706 (date de la parution de la traduction anglaise du premier volume des Mille et Une Nuits, d’après sa traduction initiale en français par Antoine Galland entre 1704 et 1717) et 1800, notant un fléchissement à partir de 1770 où les orientalistes savants commencèrent à mépriser les créations pseudo-orientales pour leur soi-disant frivolité factice. Dans chapitre 2, Gallien présente une typologie des érudits passionnés par l’Orient: l’orientaliste universitaire, le voyageur savant, l’historien des peuples orientaux, et les érudits orientalistes sur le terrain. Son troisième chapitre étudie l’usage fait de l’érudition orientaliste par les auteurs de fictions pseudo-orientales, procédant par genres: romans et romances, puis pièces de théâtre et enfin oeuvres poétiques. Prêtant attention aux préfaces, aux avertissements, et aux notes en bas de page, l’auteur décèle dans ces textes littéraires, des emprunts non avoués et des emprunts manifestes tirés des écrits des orientalistes savants. Elle perçoit deux buts derrière ces emprunts: d’abord d’étayer l’illusion romanesque et ensuite de rendre accessible au tout venant la science des orientalistes sérieux. Le chapitre 4 esquisse les transformations des textes originaux [End Page 801] en provenance de l’Orient réel, par les savants orientalistes: déplacement des manuscrits, fragmentation des écrits et traduction des originaux en langues orientales. L’auteur discerne dans ces reconstitutions des textes orientaux pour des lectorats occidentaux, leur fictionnalisation partielle par l’ajout de suppléments de qualité variable. Le dernier chapitre analyse la contribution des orientalistes sérieux à une nouvelle utilisation imaginaire de l’Orient par des écrivains anglais, assurant l’intégration du patrimoine textuel oriental dans le corpus littéraire de langue anglaise. Selon l’auteur, les savants orientalistes ont constitué une voie vers l’orientalisation de l’imaginaire anglais.

L’ensemble de l’étude tend à démontrer une interférence sans confusion totale entre culture savante de l’Orient et culture commune de l’Orient, remettant en cause la frontière imposée a posteriori entre orientalisme érudit et littérature pseudo-orientale. L’auteur manifeste un usage circonspect des publications secondaires contemporaines sur l’orientalisme. Elle nuance la conception trop essentialiste et trop peu historique de l’orientalisme selon Said, pour adopter une...

pdf

Share