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  • Aimer et compter? Droits et pratiques des solidarités conjugales dans les nouvelles trajectoires familiales by Hélène Belleau et Agnès Martial
  • Aurélie Fillod-Chabaud
Hélène Belleau et Agnès Martial. Aimer et compter? Droits et pratiques des solidarités conjugales dans les nouvelles trajectoires familiales. Québec: Presses de l’Université du Québec, 2011. 247 pp.

L’ouvrage collectif proposé par Hélène Belleau et Agnès Martial est l’aboutissement d’une réflexion engagée en 2006 au sein d’une recherche1 internationale (France, Belgique, Québec et Suisse) et pluridisciplinaire (sociologie et droit) sur la notion de « solidarité conjugale ». Les auteures proposent d’analyser cette notion au prisme de différentes configurations familiales contemporaines et s’inspirent pour ce faire d’une littérature variée (anthropologie de la parenté, sociologie économique et sociologie du droit) autour des usages conjugaux de l’argent et des solidarités familiales post-conjugales.

Qu’entendent-elles par « solidarité conjugale » ? Si « l’existence d’une entité fusionnelle, complémentaire et hiérarchisée » (p. 3) tend à s’amoindrir au sein des couples depuis les années 1970, la « norme égalitaire » est encore loin d’être universelle. En proposant la notion de solidarité conjugale, les auteures cherchent à malmener la théorie de l’individualisation des liens conjugaux, défendue notamment par les auteurs de la modernité tels qu’Anthony Giddens ou François de Singly. Les auteures souhaitent ici « réintroduire dans l’étude de la conjugalité une dimension institutionnelle qui s’exprime notamment à travers le droit et son évolution, sans oublier cependant d’interroger la relation qu’entretiennent les individus à la norme juridique » (p. 4).

Juristes (droit privé, droit de la famille, droit patrimonial) et sociologues (de la famille, du genre, de l’argent) contribuent pour moitié à cet ouvrage. Celui-ci questionne cette notion de solidarité conjugale de manière à « étayer une compréhension plus juste des rapports conjugaux contemporains » (p. 4). Comment est alors traitée cette notion au fil des contributions et selon la formation des auteurs ?

Marianne Kempeneers, sociologue de la famille, analyse dans le premier chapitre le caractère particulièrement polysémique de cette forme de solidarité, au sein de laquelle il lui semble important de dissocier sa portée statutaire et volontaire, afin de ne pas céder aux analyses qui préfèrent les concepts de « coopération » ou de « communauté », relatifs aux échanges au sein de la parenté2.

Une partie des contributions (chapitres 2, 5 et 6), rédigées par des juristes de la famille, s’attache à montrer la perspective contractuelle des solidarités conjugales, au sein d’unions, encadrées ou non par le mariage. Le mariage semble tout d’abord de moins en moins réguler la solidarité économique des couples. En effet, Nathalie Baugniet (chapitre 5) note un recours croissant au régime de la séparation des biens dans les contrats de mariage chez les jeunes couples belges, et Jean-Louis [End Page 135] Renchon (chapitre 2) constate un rétrécissement progressif des solidarités conjugales assurées par le mariage, notamment au regard de la légitimation progressive du concubinage en Belgique. L’union libre n’est pas pour autant le lieu d’un encadrement juridique des solidarités conjugales, bien au contraire. En Belgique, la création d’un statut juridique pour les couples non mariés, appelé « cohabitation légale », « n’organise rien d’autre qu’une solidarité parfaitement libre » (chapitre 2, p. 53). Au Québec, selon Alain Roy, le législateur s’est volontairement attaché « au principe du libre choix et de l’autonomie de la volonté » (chapitre 6, p. 135). Loin de vouloir modifier ce dispositif législatif, l’auteur préconise que l’Etat s’assure de la « diffusion de sa politique législative de manière à ce que les justiciables puissent en comprendre la portée » (p. 136). Selon les auteurs, le droit protègerait donc à minima les couples qui décident d’encadrer leur union par le biais du mariage, même si cette protection semble de moins en moins effective.

En amont du droit, la...

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