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  • Contestation étudiante et soubresauts étatiques :le printemps québécois sous une perspective droit et société
  • Violaine Lemay and Marie-Neige Laperrière

Mise à jour

Le 04 septembre 2012, le Parti québécois (PQ) remporte les élections provinciales et devient le gouvernement minoritaire en place. Sur la base des promesses faites durant la période électorale, cette nomination permettra un retour en classe graduel, mais complet, pour les étudiants1. Le 20 septembre, le PQ tient parole en abolissant la hausse des frais de scolarité, tout en maintenant pour cette année l'augmentation de l'aide financière par le régime de prêts et bourses, et en abrogeant la loi 12 (aussi connu sous le nom de projet de loi 78)2. Le gouvernement de Pauline Marois maintient son projet de tenir un sommet sur l'éducation, au cours duquel l'avenir du financement universitaire sera discuté. Si l'ASSÉ (devenue la CLASSE pour la grève 2012) prône la gratuité, le gouvernement péquiste proposera une indexation des frais, alors que la FECQ et la FEUQ se disent ouvertes au dialogue3.

Introduction

Depuis plusieurs mois, une crise sociale d'envergure affecte le Québec. Une décision publique de majoration des frais de scolarité provoque une réaction vaste et massive, origine d'un véritable mouvement révolutionnaire. Mené sous l'égide symbolique du « carré rouge » et souvent qualifié de « printemps québécois », le phénomène fait l'objet d'une large couverture médiatique et suscite des discussions bien au-delà des territoires québécois et canadien. À l'occasion du rôle important joué par le droit dans cette crise, la Revue canadienne Droit et société en propose ici une couverture éditoriale comme occasion privilégiée de réflexion sur les thèmes unissant ses lecteurs. Les principaux événements sont brièvement relatés pour, ensuite, faire place à quelques remarques de nature à intéresser la communauté scientifique de la sociologie et de la théorie du droit. [End Page 427]

I. Principaux événements

i. Les éléments déclencheurs

Le 6 décembre 2010, la Conférence des recteurs et des principaux des universités duQuébec (CREPUQ) réclame une hausse des frais de scolarité auprès de l'État québécois4, dont Jean Charest est à la tête, et ce dernier acquiesce rapidement5. Les dirigeants croient nécessaire de renflouer les coffres des gestionnaires universitaires par une ponction plus élevée des subsides et revenus étudiants. Ils rencontrent alors une résistance qui s'avérera solide. Les associations étudiantes et les syndicats s'indignent et quittent la table de négociation6. Une première manifestation sous la pluie, le 10 novembre 2011, réunit près de vingt mille personnes dans les rues de Montréal7. Un avertissement est lancé : les étudiants refusent cette voie. S'il le faut, ils feront la grève dès la session d'hiver 2012, mais ils n'accepteront pas une telle politique.

Le mouvement de protestation s'élabore sous l'enseigne du carré rouge. Choisi en 2004 par le Collectif pour un Québec sans pauvreté, le carré rouge a initialement accompagné une action de lutte contre un projet de réforme de l'Aide sociale, vécu comme un recul en termes de justice égalitaire8. Le carré rouge est repris, l'année suivante, comme emblème du mouvement étudiant par la Coalition de l'association pour une solidarité syndicale étudiante élargie (CASSÉE), coalition mère de la Coalition large de l'association pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE), un des interlocuteurs les plus importants de l'actuelle crise.

Le mouvement de grève débute officiellement le 13 février 20129. Dix mille étudiants, cégépiens et universitaires, donnent un mandat de grève générale illimitée à leur association. Ce nombre augmente régulièrement jusqu'au printemps10. Le 22 mars, ce dernier atteindra un maximum estimé de trois cent mille et, ce jour même, une manifestation réunira près de deux cent mille [End Page 428...

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