Abstract

A number of 19th-century bourgeois families had to cope with the problem of 'incompetent' sons amongst their midst. Given their social standing and the expectations placed upon these sons as bearers of family lineage, these young men were considered failures. This article explores one aspect of this problem: 'prodigal' sons of late-19th-century Montreal families – sons considered to be idle, spendthrifts, and irresponsible in the eyes of relatives.

From birth, inheritance gave these individuals a life of leisure. Yet, once they reached young adulthood, a time critical to the bourgois family's life cycle, these young men did not fulfill their duties as productive members of the family. This fiasco had devastating effects, both up and down the family lineage: older relatives and family peers searched for ways to avoid both the family's economic ruin and its downfall in society's symbolic hierarchy; children of these unproductive sons would not benefit from the same advantages as their fathers. Due to their behaviour, the very foundation of the elite family's reproductive cycle could be jeopardized as no favourable marriage could be concluded. In fact, the wives of prodigal sons were often deeply affected by their husbands' escapades. These women had to compensate for their husbands' shortcomings, often becoming the heads of households.

This deviant behaviour ran counter to the overlapping of personal relations and material goods prevalent in 19th-century bourgeois society. Family trajectories indicate that property can be viewed as having a direct and absolute relationship with a person – a relationship most valued in the 19th century – and that bonds can be forged through economic goods between a group of individuals. In addition, deviance on the part of prodigal sons cannot simply be seen as a violation against family or social norms, hard work, and careful management of family fortunes. A young man's failure was responsible for a gap in family relations and activities as well as a breach in the lineage timeline.

Certaines familles bourgeoises du XIXe siècle eurent à composer avec un problème particulier, du fait de la présence en leur sein de fils « incapables ». Ces jeunes hommes furent considérés comme des échecs en regard des attentes relatives à leur condition sociale et à leur rôle de continuateur de la lignée familiale. Nous explorons ici l'une des variétés de ce problème, en la personne de fils « prodigues » de familles montréalaises de la seconde moitié du XIXe siècle, individus oisifs, dépensiers et irresponsables aux yeux de leurs proches.

Littéralement portés par des successions qui firent d'eux de riches rentiers dès leur naissance, ils ne remplirent pas les exigences liées à un moment névralgique du cycle des familles bourgeoises d'autrefois : l'établissement du jeune mâle. Ce fiasco avait des effets autant en amont qu'en aval sur la lignée à laquelle ils appartenaient. Des proches et des ascendants cherchaient à éviter que la famille ne subisse une dégringolade matérielle et symbolique dans la hiérarchie sociale, tandis que les enfants des prodigues n'allaient pas tous jouir des avantages dont était muni leur père à son entrée dans le monde. Enfin, leur conduite pouvait jeter à bas la pierre angulaire de la reproduction des familles de l'élite, soit la conclusion d'une alliance avantageuse. Ce sont d'ailleurs les épouses des prodigues, parfois profondément affectées par les frasques de leur mari, qui devaient compenser l'inaccomplissement d'un rôle familial précis, celui de jeune chef de famille.

Cette expérience particulière de la déviance trahit la très forte imbrication des relations personnelles et du rapport aux biens en milieu bourgeois au XIXe siècle. Ce que ces trajectoires familiales montrent, c'est que la propriété peut être envisagée non pas seulement comme un rapport direct et absolu entre une personne et un bien, rapport que le XIXe siècle cherchait à valoriser, mais aussi comme un nœud de relations, comme la mise en relation de diverses personnes au travers de biens. Par ailleurs, la déviance des fils héritiers n'est pas non plus réductible à des infractions aux normes familiales et sociales d'établissement réussi, de travail acharné et de gestion prudente des avoirs. Cette déviance se présente également comme un espace, celui des relations familiales impliquées et activées par l'échec du jeune homme, et comme une temporalité, en fonction de ses conséquences sur la lignée.

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