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Reviewed by:
  • Songye: The Formidable Statuary of Central Africa
  • Bogumil Jewsiewicki
François Neyt , Songye: the formidable statuary of Central Africa. Munich: Prestel (hb £90 - 978 3 7913 4361 7) 2009, 400 pp., with 400 colour illustrations

Cette traduction de l'édition française originale de 2004 (La redoutable statuaire songye d'Afrique centrale) est un livre que tout amateur de l'art africain aimerait placer sur sa table basse afin que le visiteur puisse admirer les images dont la qualité photographique n'est comparable qu'avec la qualité esthétique des artefacts présentés. Statuettes et masques pour la plupart, ces œuvres ont été depuis plus d'un siècle récoltées au nord de la région actuelle du Kasai, le long du cours supérieur du fleuve Congo portant dans cette partie le nom de Lualaba.

Suivant l'usage dans les galeries, les maisons de vente et chez les collectionneurs, François Neyt qualifie ces œuvres de songye, d'où le titre du livre 1 . L'adjectif est formé à partir du nom d'un groupe ethnique : « tribal people located in the Democratic Republic of Congo ». François Neyt se conforme aux us et coutumes du milieu auquel ce livre s'adresse en priorité 2 . Le feuillet publicitaire de la maison d'édition le cible ainsi : « This unique collection of rarely seen tribal art brings together nearly one thousand examples of powerful artefacts from the Songye tribe of Central Africa 3 ). Pourtant, dès la première page, Neyt informe le lecteur du caractère artefactuel de la qualification « tribale ». Les informations historiques qu'il apporte dans un bref chapitre montrent que depuis plus de cent ans les gens nommés Songye ont été soumis à une chaîne de profonds et violents bouleversements, ont intégré de gré ou de force de très nombreux migrants. Les artefacts que les artisans/artistes ont continué à produire pour représenter le monde et pour y intervenir répondaient à leur effort de comprendre et de maîtriser ces changements. Cherchaient-ils à représenter ainsi leur identité collective « tribale » ? Ceux pour qui ces objets ont été produits et qui s'en servaient pour intervenir dans leur univers les recevaient-ils comme « songye » ? Peut-être, au contraire, les uns et les autres voulaient-ils pour ces objets une attraction et une pertinence plus vastes, voire universelles?

François Neyt n'aborde pas ces questions, mais certains travaux de Jan Vansina permettent de suggérer des réponses par la comparaison avec une région voisine. Il y a plus de 40 ans, Vansina avait déjà montré que l'impératif de contrôle des forces supranaturelles (maladie, malheur, infertilité, accidents climatiques) auquel répondaient les «mouvement religieux », se traduisait dans [End Page 497] cette région par une vigoureuse dynamique d'emprunts. Mettre en valeur l'origine « étrangère » d'un culte y fut parfois source de son succès. Dans son dernier livre 4 , que François Neyt ne pouvait évidemment pas connaître, Vansina traite d'un précoce reformatage de l'« artisanat » kuba, en direction d'un standard « ethnique », en formation dans la capitale du royaume kuba à partir des années 1930. Ce processus correspondait à la demande du marché et, de surcroît, permettait au roi d'exercer un certain contrôle sur ce marché.

Les artefacts, parmi lesquels l'amateur/marchand occidental sélectionnait - selon ses propres critères - des « œuvres d'art », étaient donc soumis à une double logique de diversification et de standardisation. En position dominante, tant en termes de pouvoir d'achat qu'en termes de pouvoir tout court, l'acheteur (parfois pilleur) occidental avait probablement dès le départ contribué à la sélection - sous la dénomination « songye » ou « kuba » - des artefacts dont les caractéristiques esthétiques répondaient au goût occidental pour l' « art primitif », pour l' « art tribal ». Au cours du XXe siècle, ces objets, sources de revenu pour les locaux, sources de prestige pour la puissance coloniale, puis pour l'État nation, ont ainsi donné une existence réelle à la catégorie d'œuvres d'art « tribal ». Cette catégorie du marché d'art est le...

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