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LA CONNAISSANCE INTELLECTUELLE DU SINGULIER MATÉRIEL AU XIIIe SIÈCLE La présente esquisse historique est une introduction à la connaissance intellectuelle du singulier matériel selon Duns Scot. Le choix des auteurs a été déterminé, non par le souci d'écrire une histoire complète de ce problème au moyen âge ou même dans l'école franciscaine, mais par celui de retracer les sources de l'enseignement du Docteur Subtil et de reconstituer le contexte doctrinal dans lequel sa solution personnelle doit se lire. A qui est est familier avec le scotisme ce choix ne paraîtra peut-être pas injustifiable. Même résumé ici, allégé ailleurs de ses notes compl émentaires primitives et des textes justificatifs non nécessaires à l'intelligence de notre pensée, notre travail sera, nous nous en sommes laissé persuader, une utile contribution à l'histoire de la connaissance du singulier au moyen âge. Au moment où Duns Scot élaborait sa propre solution, les auteurs se partageaient en deux groupes de composition fort différente. L'intellection indirecte pouvait être considérée comme traditionnelle et purement philosophique, car elle remontait à Aristote par Avicenne et Averroès. Empruntée à Avicenne par Alexandre de Halès, formulée de façon plus techniquement aristotélicienne par saint Thomas, elle venait de recevoir d'Henri de Gand une contexture empruntée à la fois à Averroès et à Avicenne, mais ne se trouvait plus en faveur dans les milieux franciscains où elle était supplantée par l'intellection directe. Celle-ci ne semble pas trouver de défenseurs avant le dernier tiers du XIIIe siècle. Suscitée peut- être par le culte de Roger Bacon pour l'individuel et l'expérimental , son apparition dans les écoles ne semble guère remonter audel à des luttes doctrinales qui se déroulent autour de 1270-1277. Elle se présente dans le Correctoire de Guillaume de la Mare comme une thèse de théologiens inquiets pour la pureté de la foi pour devenir bien vite un thème de ce que l'on appelait alors la philosophie de saint Augustin. Soutenue avec zèle et brio par un groupe compact de maîtres franciscains, elle présente assez tôt des signes d'attiédissement puisqu'une voie moyenne est ouverte par Richard de Middleton et Vital du Four. L'axe des problèmes se déplaçant l'écart entre les solutions en présence n'apparaîtra pas assez net pour qu'un Duns Scot se sente forcé de choisir entre [157] [158] LA CONNAISSANCE INTELLECTUELLE DU SINGULIER MATÉRIEL l'une et l'autre. Il acceptera l'essentiel des deux positions tout en récusant les présupposés doctrinaux de chacune d'elles. La clarté de ses explications techniques sur la nature de la connaissance abstractive et de l'intuition voilera l'ambivalence ou, si l'on veut, l'embarras de son opinion personnelle et induira maints disciples à laisser dans l'ombre la thèse si formelle de l'intellection indirecte pour exalter l'intuition assez timidement esquissée pourtant par Duns Scot mais vulgarisée depuis et mise en valeur par Guillaume d'Ockham. II se trouvera, par contre, des scotistes de premier plan, tel Mastrius, pour soutenir que l'intuition du singulier matériel affirmée par le Docteur Subtil n'est pas autre que l'intellection indirecte prônée par l'Aquinate. Mais quelle fut la cause de l'apparition de la théorie de l'intellection directe du singulier? La cause prochaine en fut, pensons-nous l'incidence des spéculations philosophiques en théologie par l'application que les arabisants de Paris firent des principes fondamentaux de l'intellection indirecte telle que soutenue par Avicenne, Algazel et Averroès aux sciences divine et angélique. Le Dieu des philosophes arabes règne solitaire dans la contemplation du nécessaire et de l'universel et ignore le contingent et le particulier. Les théologiens—les condamnations parisiennes ainsi que le De Erroribus Philosophorum de Gilles de Rome en témoignent—dénoncèrent ces propositions hérétiques. Ils en poursuivirent les moindres soup- çons...

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