Haiti: Entre beaute et blessures

Loin de ma terre

89 Loin de ma terre Le ciel crache sur ma tête Le venin acide des aspérités de l’hiver De l’exil permanent Que je suis forcé de vivre Loin des douceurs de tes alizés Et des splendeurs de ton horizon Bleui par la pureté de ton firmament Le bonheur verdoyant de mon cœur Autrefois fertile D’allégresses et de douces folies est tari Et mon âme aujourd’hui désert De sable brûlant et mouvant Est source de pleurs intarissables Le coin de ciel où ma tête arbore Un semblant et satisfaisant repos Sous les douloureux arçons d’un exil doré Fait pleuvoir chaque jour dans mon cœur Un déluge qui noie mes rêves Dans les murs abricot de mon bienheureux asile J’ai fui devant la mort pour ne trouver que la mort Chez un peuple de roses couronné Pour sa croyance aux valeurs humanistes Et son maintien de l’étendard des valeurs universelles Dans les cimes élevées des Droits de l’Homme Loin de tes seins hélas Je contemple les yeux hagards et l’âme effarée L’indolence et la non-pugnacité de mes frères Devant l’impudeur des félons Qui trempent leur barbe 90 Telles les racines dans le clairin ou le Cinq Etoiles Dans le sang ambré du peuple Et je me révolte loin de tes murs Du spectacle infâme et impudent Que donnent ces vampires aux têtes glabres Humant jusqu’à la lie l’odeur pestilentielle Des cadavres que leurs mains ivres Répandent sur les pavés des rues fatiguées Et Port-au-Prince qui fut dans les années d’après-Guerre Avec toute la beauté qu’elle offrait Au beau monde qui y allait chercher Exotisme détente spirituelle et plaisirs Des sens tous les week-ends Le centre cosmopolitique du monde Devient aujourd’hui la risée des nations Le théâtre bouffon et tragique Qui satisfait tous les goûts Par la faute de ces ânes-faucons Auxquels nous donnons la clef du palais Complainte Nous chantons sur des rives inconnues Des airs roses aux oreilles des Nymphes tombés Comme une rosée d’améthyste Qui s’échappe de nos yeux Cherchant un ailleurs Pour échapper Aux dures flèches de l’exil ...