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vii Préface Première République noire, Haïti est le premier peuple asservi à avoir défié le système esclavagiste en proclamant son indépendance vis-à-vis de la toute puissante France napoléonienne, esclavagiste et impérialiste, qui portait ses exploits belliqueux dans toutes les portes de l’Europe et même au-delà. Peuple d’esclaves ayant rompu les chaînes de l’esclavage dans un monde marqué par une seule réalité, celle de l’esclavage, Haïti brandit non seulement une révolution au même titre que la française ou l’américaine, mais encore voulait porter cette révolution partout chez les peuples d’esclaves ou de colonisés qui croupissaient sous le joug infâme de l’esclavage et de la colonisation. Expérience qui fait rêver. Expérience qui met en valeur un peuple valeureux dans toute l’histoire mondiale dont l’exemple voulait se proposer même en cas d’école. Mais hélas ! Cette glorieuse victoire des faibles sur les forts, de la justice et du droit sur un système qui exploitait, de la façon la plus inhumaine qui fût, les faibles sous le prétexte fallacieux de civilisation des sauvages, aura vite montré ses faiblesses et ses limites, au point où l’on est parfois tenté de se demander si la horde des esclaves était déjà prête pour l’aventure qu’elle avait menée.. Mais toutefois, c’est sans donner lieu aux esclavagistes et à leurs partisans de justifier leur immorale imposture. Dès la mort de Jean-Jacques Dessalines, très peu de temps après la « glorieuse » indépendance, l’opprobre est jeté sur le peuple illustre par ses frères qui se montreront tous indistinctement indignes de la révolution haïtienne. Hélas ! Haïti offrira depuis le spectacle viii macabre, burlesque et piteux d’un peuple incapable de construire une société juste et démocratique. Dieurat Clervoyant (ne vous étonnez pas de voir ailleurs l’autre orthographe du nom de l’auteur, « Clairvoyant ») se fait le chantre des différents moments qui marquent l’histoire haïtienne. Poète qui vit en France depuis 24 ans, Clairvoyant s’exprime, parfois avec une virulente violence que peut seul comprendre l’exilé qui vit dans une perpétuelle nostalgie de la terre natale. Son verbe à l’égard des dirigeants de son pays n’est pas toujours agréable, pour ne dire même qu’il est généralement discourtois et accusateur. Homme d’une morale austère, il se laisse pourtant aller dans Obséquiosité par exemple dans l’expression d’une colère qu’on pourrait caractériser d’une grande immoralité. On sent toute la douleur éprouvée par le poète devant le sempiternel malheur de son peuple. S’il se montre dur, sévère à l’égard de la nature qui ne se montre pas toujours juste à l’égard de sa chère Haïti, c’est surtout les dirigeants haïtiens qu’il rend responsables de l’éternel malheur du peuple. Mais Clervoyant ou Clairvoyant, une façon de vous habituer à ces deux orthographes, n’est pas le poète qui se complait uniquement dans l’accusation ou la dénonciation de l’immoralité de ses compatriotes. Il fait vivre ou revivre, pour ceux qui connaissent cette réalité, l’espace-temps haïtien, du moins celui qu’il a connu avant d’avoir quitté Haïti, comme un paradis où il faisait bon vivre malgré les inconvénients signalés. Pas mal de moments, d’heureux moments semblent avoir marqué le peu de temps de son existence qu’il a passé dans ce pays. On sent chez Clervoyant, à travers la description de ces moments, l’habitation du mythe de la terre natale dans l’inconscient de tous les exilés qui vivent loin de leur pays. Clairvoyant, qui après 24 ans de rupture dans l’espace-temps avec son pays qui hante sans cesse son esprit [3.145.191.214] Project MUSE (2024-04-25 15:27 GMT) ix et ses rêves, livre dans Haïti, entre beauté et blessures, la vision d’un poète frappé d’interdiction (une espèce de refus) de rentrer dans son propre pays, en raison des événements politiques et sociaux malheureux qui frappent sa misérable patrie sur la chaîne ininterrompue des faits qui marquent l’histoire de...

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