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199 Chapitre 6 La chaise vide du père et l’ébranlement du sujet L a notion ambiguë de la cause cache, en fait, signale KremerMarietti , quelque chose de non-conceptuel qui, dirions-nous,« ‘cloche’ et cette clocherie s’insinue toujours entre la cause et ce qu’elle affecte [..,] les lacunes ininterprétables [ont] un sens même s’il n’appar[aît] pas ; là, même plus que dans le discours conscient, les intentions fourmillent et rien n’est dit en vain [...] Et quand le sujet trébuche, c’est qu’il accuse la fêlure par laquelle se sont unis deux éléments choquants entre eux et, de manière invisible, dans la résistance ».1 Ainsi, on a vu apparaître et disparaître pour reparaître, clignoter de manière périodique une figure que le manuel n’évoque, pour ainsi dire, pas, sinon dans une collection ou par comparaison : le signifiant de la fonction paternelle reste une chaise vide du discours du livre de lecture. Dans la réalité, on le sait, le père est occupé au travail d’impôt et n’assure par conséquent pas sa tâche nécessaire de médiation culturelle. L’enfant éprouve en conséquence doublement l’absence du père, comme sujet de défaite et comme être de démission. Manque dès lors dans sa construction psychique la case de la projection, en place de quoi supplée comme elle peut l’image de l’identification, qui ne peut suffire à l’élaboration du symbolique. Or, rappelle Kremer-Marietti, « la métaphore paternelle se trouve au centre de la psychanalyse lacanienne [...] L’intersubjectivité paranoïaque n’est pas sans analogie avec la mise en question du sujet dans son existence. En effet, dans le jeu des signifiants, le sujet entre comme un mort tandis que les trois signifiants constituent le triangle père-mère-enfant structurant déjà dans le futur les trois instances du Surmoi, du Moi idéal et de la réalité qui les concerne ».2 200 Réussite scolaire, faillite sociale : généalogie mentale de la crise de l’Afrique Noire S’il entre comme mort dans ce système de relation, le sujet va advenir en investissant de façon imaginaire l’objet du désir de la mère, le phallus auquel il cherche à s’identifier. Le phallus joue chez les deux sexes le rôle de pivot du procès symbolique. Aussi le troisième terme du ternaire imaginaire est-il l’image phallique évoquée par la métaphore paternelle. Et Lacan donne l’algorithme expressif : Nom-du-Père Désir de la mère A Nom-du-Père ( ) Désir de la Mère Signifié au sujet Phallus La métaphore du Nom-du-Père substitue ce Nom à la place symbolisée par la signification phallique ou par la fonction du phallus : là même où le Père fait défaut, son signifiant est présent [...]3 On a compris que nous ferons peu de cas de l’Oedipe, puisque le père originel ne peut être un obstacle réel à la projection du moi. La tradition, qui est la métaphore du Nom-du-Père, a été mise à mal dans la guerre coloniale. Mais la signification phallique restée invariante, la fonction du phallus doit être assurée. Aussi bien l’École s’institue à la place vacante pour satisfaire le désir de la mère, c’est-àdire construire l’imaginaire du sujet. Principe de réalité, en tant simplement qu’elle incarne la Loi nouvelle, l’École est identifiée par l’enfant au désir de la mère, par quoi elle devient aussi principe de plaisir. Cette concentration de tous objets dans un même appareil exogène signe la destitution de la famille originelle dans le procès de formation du sujet scolaire. On se rappelle que l’ébranlement de l’identification au désir de la mère supprime, dans le cas Schreber, le trépied imaginaire structurant : « dès lors, Schreber, ‘faute de pouvoir être le phallus qui manque à la mère’, deviendra ‘la femme qui manque aux hommes’ sans y réussir, toutefois, et pour finir dans la propitiation ou la réconciliation avec Dieu ».4 L’application du cas Schreber à la logique du proverbe toucouleur donne à [18.191.174.168] Project MUSE (2024-04-26 15:36...

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