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123 Les étudiants africains et la littérature négro-africaine d’expression française 25 Hommage à David Diop Extrait de L’Etudiant sénégalais, journal mensuel de l’Association des étudiants sénégalais en France (AESF) n° 1 janvier 1964 Amady Aly Dieng David Diop nous a tragiquement quittés en août 1960, à la suite de l’accident d’avion survenu au large de Dakar. Sa vie a été trop brève (1927-1960) pour lui permettre de tirer toutes les flèches qui étaient à son arc. Que nous a-t-il laissé en héritage ? Un mince recueil de poèmes : Coups de pilon, plein de densité et de chaleur humaine et surtout l’exemple d’une vie dévouée à la cause de l’émancipation de l’Afrique. David avait horreur de la pure spéculation. L’action transformatrice est au départ et à l’arrivée de sa réflexion. Son sens des responsabilités ne le quitte jamais, même jusque dans sa poésie. Celle-ci n’est qu’un moyen, non une fin pour lui. Sa David a subi l’influence de ses aînés, il s’en est très vite dégagé ou tout au moins, il a rejeté certaines influences pour ne garder que les bonnes qui ont contribué à donner à son art une très grande résonnance parmi les jeunes intellectuels africains. Il s’est très vite affirmé contre son aîné Léopold Sédar Senghor sans outrance de langage, en s’engageant résolument dans la voie de la poésie militante et abandonnant à d’autres esthéticiens le soin de s’adonner aux « exercices de style » et aux « discussions formelles ». Il a choisi son peuple non en parole, mais dans la réalité. Le français, langue des Dieux pour certains poètes africains, est pour David un moyen d’expression provisoirement imposé par la réalité coloniale et historiquement condamnée :« Certes dans une Afrique libérée de la contrainte, il ne viendra à l’esprit d’aucun écrivain d’exprimer autrement que par sa langue retrouvée ses sentiments et ceux de son peuple. Et dans ce sens, la poésie africaine d’expression française, coupée de ses racines populaires, est historiquement condamnée ». David, s’il a une claire intelligence des phénomènes sociaux, ne néglige pas de lutter « par ses écrits pour la fin du régime colonial », condition indispensable à « la renaissance de nos cultures nationales ». Diop a bien saisi le sens profond de la lutte de l’Afrique qui n’est pas un combat uniquement culturel : celui-ci est avant tout politique au sens le plus noble du terme. C’est pourquoi il a pris ses responsabilités en allant enseigner en Guinée au moment de l’indépendance. David a chanté la « négritude », mais de façon radicalement différente de la manière senghorienne. David a d’abord une foi immense en l’« Afrique des fiers 124 Les étudiants africains et la littérature négro-africaine d’expression française guerriers ». Cette confiance aux hommes de son pays est un trait dominant de son œuvre poétique :« L’espoir vivait en nous comme une citadelle Et des mines de Souaziland à la sueur lourde des usines d’Europe Le printemps prendra chair sous nos pas de clarté ». David est le poète de l’avenir ; le passé n’est pas un simple prétexte à des pleurs, à des lamentations ou à des reconstruc-tions mythiques. Le poète, conscient de sa mission, doit « refuser à la fois l’assimilation et l’africanisme facile ». La négritude chez l’auteur de Coups de pilon est un simple moment dans la prise de conscience. Elle refuse d’être « originalité à tout prix », pour n’être qu’une étape dans la redécouverte de soi. La négritude n’est pas close : elle est une simple protestation contre ce que le capitaine nous présente comme civilisation« universelle ». C’est une revendication du « droit à l’initiative ». Fidèle à son amour pour l’Afrique, David dénonce l’hypocrisie des « vautours » de la colonisation.« Hommes étranges qui n’étiez pas des hommes ». Il ne ménage pas le rénégat :« Mon pauvre frère, au smoking à revers de soie Piaillant et susurrant et plastronnant dans les salons de la condescendance, Tu nous fais pitié ». Si David évoque le passé, c’est pour y trouver des...

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