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23 Les étudiants africains et la littérature négro-africaine d’expression française 6 Essai sur la poésie africaine Henri Lopes Le problème africain est sans conteste dans les jours que nous vivons un problème politique. Cela explique pourquoi l’étudiant africain accorde dans sa vie une place primordiale au politique. Mais il ne laisse pour autant pas d’avoir conscience que cette politique n’est pas faite pour elle-même. C’est une politique mise au service d’une vie meilleure, une vie où l’organisation sociale de l’Afrique si longtemps bafouée permettra à chacun d’accéder au patrimoine culturel ; ainsi, pourrons-nous apporter une contribution solide à la pensée universelle des peuples. C’est pourquoi, on ne saurait trop faire d’éloges à l’initia-tive de notre Fédération qui s’est donnée le mal d’organiser un séminaire sur la littérature négro-africaine et la politique. Car à ceux qui pensent que le titre de notre séminaire révèle un engour-dissement dans notre lutte anti-colonialiste, répondons avec l’écrivain algérien, Henri Kréa :« L’on sait que la culture est l’ennemi numéro un du colonialisme comme du nazisme dont on ne voit pas la différence formelle autant que quotidienne ». Et Kréa ajoutait :« car ce postulat est irréfragable : seul un peuple libre peut avoir une culture libre ». L’histoire nous enseigne que la liberté ne s’acquiert pas sans lutte organisée. Nous essaierons donc ici de brosser à grands traits une esquisse de manifeste (si le terme n’est pas trop prétentieux) pour une jeune poésie africaine et combattante. A cet effet, nous nous servirons de ce qui a déjà été écrit par d’autres poètes noirs qui ont perçu le sens dans lequel l’on devait se diriger. Ainsi, je citerai beaucoup Guy Tirolien, dont pourtant j’avais mal compris le message, comme l’atteste un article précédemment écrit. Enfin, avant de pénétrer au cœur même de notre sujet, je dois souligner tout de suite les limites de mon intervention : elle devrait, pour être vraiment enrichissante, sortir de la bouche d’un poète ou d’un critique. Je ne suis ni l’un ni l’autre. Néanmoins, je serais heureux si ma contribution apportait des solutions constructives aux problèmes que se posent nos griots contemporains. Ce qui me frappe d’abord est : I. La situation particuliere de notre poesie, sans examen de laquelle on risquerait de se maintenir dans de vaines generalites. 24 Les étudiants africains et la littérature négro-africaine d’expression française 1. Il y a un problème d’expression La beauté d’une poésie vient souvent de la beauté des vers, ce qui veut dire que le poète a disposé avec goût des mots de sa langue natale. Or, il arrive dans notre pays que l’élite intellectuelle qui chante des poèmes ne sait plus bien parler sa langue natale. Le saurait-elle qu’elle verrait son message circonscrit aux frontières d’une région de l’Afrique, alors qu’elle veut s’adresser à tout le continent, à des hommes dont la langue diffère. Et il faut avouer que c’est là un drame bien tragique : pour chanter les tornades tropicales, pour évoquer les rives congolaises ou la souffrance du docker de Dakar, nos chantres sont obligés d’user de la langue gauloise du paysan des bords de la Loire, qui sert aussi aux « paras » à donner le signal de l’assaut contre les soldats de l’ALN ou contre les soi-disant « terroristes » de l’UPC. Ecoutez comme le poète haïtien, Léon Lalleau, a su traduire ce drame :« Ce cœur obsédant, qui ne correspond Pas à mon langage ou à mes costumes, Et sur lequel mordent, comme un crampon Des sentiments d’emprunt et des coutumes D’Europe, sentez-vous cette souffrance Et ce désespoir à nul autre égal D’apprivoiser avec des mots de France, Ce cœur qui m’est venu du Sénégal ? » Thème que reprend son compatriote Jean F. Brière en constatant :« Nous avons désappris le dialecte africain, Tu chantes en anglais mon rêve et ma souffrance Au rythme de tes blues dansent mes vieux chagrins, Et je dis ton angoisse en la langue de...

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