In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

8 Les étudiants africains et la littérature négro-africaine d’expression française 4 Conscience nationale et poesie negro-africaine d’expression française Condotto Nene Khaly Camara En art comme dans la vie, il est deux vérités d’évidence, qui sollicitent de la part de l’homme une prise de position non équivoque : le non-engagement et l’engagement. Sur le plan plus général de l’évolution historique, le premier terme de cette alternative signifie que l’individu se refuse à s’intégrer dans le mouvement général de l’univers, tandis que le second commande un choix réfléchi de toutes les ressources à mettre en jeu pour améliorer la condition humaine et réaliser par enrichissements successifs le plein épanouissement de la société. Chaque art a ses vertus propres qui tiennent à son mode d’expression et aux limites de celui-ci : la musique et la danse, la peinture et la sculpture et aussi la littérature. Chaque forme artistique vise à émouvoir part ou totalité, c’est-à-dire la personne physique et toutes ses facultés intellectuelles. Dans sa forme, cette action qui s’exerce par l’art sur l’hom-me fait appel aux sentiments, bons ou mauvais, par là elle entraîne soit vers le non-engagement lorsqu’elle stimule les sentiments de pure délectation individuelle, soit vers l’engagement lorsqu’elle concilie sentiment et raison, émotion et conscience. Alors l’art devient une immense force matérielle parce qu’elle fait pénétrer l’idée au sein des masses, pour reprendre la formule de Marx. Elle trouve alors sa place, à côté d’autres facteurs qui meuvent le développement historique. Près de l’action froide et sans fard du jeu des forces productives de la société, il assume un rôle de stimulation et de catalyse. L’art traduit les préoccupations de la société dans ses aspects généraux comme dans ses aspects particuliers : dans une société de type bourgeois, son expression générale sera nécessairement bourgeoise, dans une société de type socialiste, elle traduira des sentiments socialistes. Mieux, à l’intérieur de la société bourgeoise qui voit se développer des conflits de classes, elle prendra les formes que revêtent ces luttes : ainsi, dans une société capitaliste se trouveront toujours des éléments d’un art prolétarien. De même, dans une société qui se construit socialiste et communiste mais, conserve encore des aspects négatifs, il n’est pas exclu de rencontrer des traces décadentes d’un art bourgeois. Dans l’expression artistique d’un peuple, d’une nation se laisse deviner le faciès du stade où il se trouve dans l’évolution historique. Un coup d’œil panoramique sur l’histoire de la littérature négro-africaine d’expression française suffit à le prouver. 9 Les étudiants africains et la littérature négro-africaine d’expression française *** La littérature négro-africaine d’expression française ne pouvait naître qu’avec la mise en place d’institutions coloniales après la conquête militaire de la fin du XIXème siècle. Cette prise de possession du continent par les Allemands, les Anglais, les Belges, les Espagnols, les Français, les Italiens et les Portugais, procéda en premier lieu à une dislocation des anciennes structures traditionnelles et à une destruction systématique de toutes les valeurs culturelles, afin de prévenir précisément toute tentative de cristallisation d’une conscience culturelle qui eût pu mettre en cause la réalité de l’asservissement politique et économique. L’Afrique pré-coloniale possédait une littérature écrite utilisant les caractères arabes soit pour créer des œuvres dans la langue du Coran, soit pour fixer celles-ci dans des langues négroafricaines mêmes. Aussi, la langue arabe fut-elle combattue, voire bannie dans les régions où elle avait fondé une forte tradition culturelle. Les bibliothèques des lettrés nègres furent pillées ou incendiées, qui contenaient tarikh, traités de théologie, poèmes religieux ou de circonstances, etc. Refusant aux colonisés l’assimilation politique, le colonialisme français, pour sa part, chercha à réaliser l’assimilation culturelle des hommes, violant ainsi leur conscience, leur raison et leurs sentiments. Les premiersintellectuelsnégro-africainsd’expressionfrançaisefurentd’abordceuxnourris dans le sérail de...

Share