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17 Depuis les années 80, l’étude de l’origine de l’homme anatomiquement moderne, de sa variabilité et de ses comportements constitue peut-être le sujet le plus passionnant de la Paléoanthropologie et de la Préhistoire. La variabilité de l'homme moderne des époques paléolithiques a fait l’objet de recherches intenses durant deux périodes distinctes de l'évolution humaine. La première est celle des stades isotopiques (OIS) 6 et 5e avec les plus vieux hommes modernes d'Afrique (e.g. Day & Stringer 1982; White et al. 2003; Haile-Selassie et al. 2004) et du Proche-Orient (e.g. McCown & Keith 1939; Vandermeersch 1981; Tillier 1999). La mise en évidence, en Israël, de cette population d’Homo sapiens sapiens, pénécontemporaine d’hommes non anatomiquement modernes (au moins en Europe), et associée à un techno-complexe moustérien, a suscité d’intenses réflexions sur les premiers hommes modernes et sur les comportements supposés propres à ces derniers (McBrearty & Brooks 2000). La seconde période d’attention concerne les stades isotopiques 2 et 1 avec l'expansion des hommes modernes dans toutes les parties du monde (e.g. Stringer & McKie 1997) et la caractérisation de la variabilité actuelle (e.g. Lahr 1996). De plus, les résultats de la génétique et de la paléog énétique sont venus alimenter cette thématique (e.g. Relethford 2001). Les études du génome humain vont dans le sens d’une origine récente des hommes actuels depuis un « stock génétique moderne » africain ayant subi une ou plusieurs crises démographiques (ou effet bottleneck) suivies de vagues d’expansion (Harpending & Rogers 2000; Excoffier 2002; Garrigan & Hammer 2006). Il est impossible de synthétiser en une phrase les résultats complexes de ces travaux. Cependant, beaucoup de recherches s’accordent actuellement pour consid érer que l’étude des populations actuelles ne témoigne que d’une partie restreinte de la variabilité passée des hommes anatomiquement modernes. Il est donc essentiel de mieux connaître cette dernière afin de concevoir l’évolution et la définition biologique d’Homo sapiens et d’en apprécier toute la complexité. Une des périodes cruciales pour tenter de répondre à ces interrogations pourrait être celle du stade isotopique 3 (OIS 3). Toutefois, la variabilité des hommes modernes de la majeure partie du Pléistocène supérieur est très mal connue. Il existe en effet très peu (trop peu) de restes humains complets et bien datés au-delà de 30 Ka. Les études morphologiques et l’étude de l’ADN mitochondrial des premiers représentants de notre espèce attestent pourtant une variabilité beaucoup plus complexe que celle observée actuellement (e.g. Vandermeersch 1981 & 2005; Thorne et al. 1999; Adcock et al. 2000; Trinkaus 2006c). Dans le cadre de cette problématique, la découverte des restes humains de Nazlet Khater 2 (NK 2) revêt un intérêt paléoanthropologique très particulier. Le squelette de NK 2 a été mis au jour en 1980 dans la vallée du Nil près de Tahta (Egypte) par le Belgian Middle Egypt Prehistoric Project (BMEPP) dirigé par P. Vermeersch (Vermeersch et al. 1984a). Ces restes, datés directement aux alentours de 38 Ka (Grün, comm. pers.), sont associ és au site minier du Paléolithique supérieur de Nazlet Khater 4 dont la période d’exploitation s’étale de 40 à 35 Ka (Vermeersch 2002a). La position chronologique de ce spécimen le place au centre d'un hiatus de près de 35 Ka pour lequel aucun reste humain n'a été exhumé dans la vallée du Nil et en fait le plus ancien homme moderne adulte de l’OIS 3 au nord de l’Afrique. Pour la première moitié de cette période, et à notre connaissance , c’est également le seul squelette d’adulte moderne sub-complet de tout le continent africain, voire de l’ancien monde. Seuls les restes partiels immatures de l’enfant de Taramsa (Vermeersch et al. 1998) sont plus anciens. Le squelette de Nazlet Khater 2 est presque complet à l’exception des parties distales des jambes et de la plupart des os des pieds. Il offre par conséquent une opportunité unique d’appréhender une partie de la variabilité des hommes modernes. Les restes de NK 2 ont déjà été partiellement étudi és. Tout d’abord par...

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