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3 Familles en survie dans un espace défavorisé à Ouagadougou Marie-Thérèse Arcens Somé Introduction Le Burkina Faso est un pays d’Afrique de l’Ouest, carrefour d’échanges dans la sous-région, pays de transit entre les pays sahéliens (Mali et Niger) et les pays côtiers (Ghana, Togo, Bénin, Côte d’Ivoire). Aujourd’hui, la commune de Ouagadougou dépasse le million d’habitants (INSD 2007 : 24). À la faveur de la politique de décentralisation (à partir de 1992), la commune de Ouagadougou a été scindée administrativement en 5 arrondissements dans lesquels se répartissent une trentaine de secteurs. L’arrondissement de Boulmiougou (un des arrondissements de Ouagadougou) est administré par un maire et un conseil municipal, élu pour 5 ans. Le terrain d’étude est le secteur 19 situé en périphérie sud-ouest de la ville de Ouagadougou, dans l’arrondissement de Boulmiougou. La population du secteur est estimée en 2006 à 44 827 habitants dont 21 759 femmes et 23 068 hommes (INSD 2007 : 24). Le concept « droit à la ville »1 fait ressortir le droit pour les différents acteurs sociaux d’accéder à l’existant. Pour mettre en pratique ce droit, il faut avoir la capacité de le revendiquer, de s’identifier à un espace donné, de s’organiser et de faire valoir sa place dans la société. Le « droit à la ville » renvoie à la dynamique sociale, à la conscientisation, l’acquisition de capacités et de responsabilisation, dans la transformation de son espace de vie. Des enfants naissent et grandissent en marge de la ville organisée. Beaucoup parmi eux ont perdu leurs repères familiaux et culturels. Le chômage chronique du chef de famille entraîne bien fréquemment une grande misère et affecte Négocier sa vie : les enfants et les jeunes dans les espaces urbains d’Afrique 34 directement les enfants (Marguerat 2003 : 7). D’autres causes comme la séparation des parents, la violence intra conjugale sont autant de facteurs de plus en plus fréquents dans les familles urbaines. Elles déstabilisent l’enfant et le jettent dans les rues des villes (Marguerat 2003 : 7). Le secteur 19 n’est pas épargné par ce phénomène. Certains enfants très jeunes ne vivent pas avec leurs parents biologiques pour diverses raisons : divorces, enfants confiés, orphelins. Les parents qui en ont la responsabilité privilégient leurs propres enfants et cela aboutit souvent à la maltraitance, à l’exploitation domestique, aux abus sexuels, à l’indifférence amenant une carence affective pour l’enfant (ADLV/ B 2007). La rupture partielle ou totale avec sa communauté villageoise a pour conséquence une carence éducative dans le domaine de la socialisation. Les valeurs traditionnelles qui sont inculquées à travers les rites culturels ne se transmettent plus que partiellement. Sans transmission de valeurs et en échec scolaire, certains enfants grandissent sans véritables repères. Les seules issues qu’ils jugent valables sont les voies de la facilité conduisant à la petite délinquance, pour satisfaire leurs besoins élémentaires. L’une des plus graves difficultés réside dans l’interruption de la scolarisation chez les enfants en bas âge (niveau primaire). Elle génère un sentiment précoce d’exclusion et un désœuvrement dont les conséquences sont les dérapages dans la délinquance juvénile. Selon Tanon Fabienne (2003), les enfants à Abidjan se retrouvent déscolarisés pour quatre raisons essentielles : la peur de l’enseignant, les travaux domestiques, la pauvreté des parents ou le décès du soutien de famille. À Ouagadougou, selon la perception des enfants, les enfants scolarisés représentent la norme et ceux non scolarisés l’exception (Baux 2007). L’analphabétisme devient un facteur de marginalisation, car il empêche de comprendre la règle sociale, particulièrement en milieu urbain. Au secteur 19, les enfants et les adolescents sont souvent livrés à eux-mêmes, car le père et la mère sont chacun à la recherche de moyens de subsistance. Ils font différentes expériences dans leur quartier, comme la cigarette, la drogue, la prostitution, loin du regard des adultes censés les protéger. Cette étude a pour objet d’analyser la dimension de la négociation des moyens d’existence chez les enfants et les adolescents vivant dans un espace urbain défavorisé. Après avoir présenté l’espace de vie précaire dans lequel vivent les familles...

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