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Introduction Citoyenneté, violence et crise des paradigmes dominants Jean-Bernard Ouédraogo et Ebrima Sall Collective identities are made, not found. But they can only unify the heterogeneous. Citizens who share a common political life also are others to one another, and each is entitled to remain an Other. Jurgen Habermas Le principal objectif de ce volume, après avoir justifié la tenue de la conférence dont il est issu,1 est de rechercher un début d’explication à la série d’événements survenus depuis 1999 et qu’il est convenu d’appeler la « crise ivoirienne ». Il nous a semblé que l’interprétation évènementielle des faits apportait des explications insatisfaisantes à cette fracture profonde et que la bonne perspective conduisait obligatoirement à revisiter les catégories théoriques essentialistes que s’obstine à nous imposer un regard faussé, alourdi par des préjugés ethnocentriques, sur les faits constatés. Suivant l’esprit des « Séries de dialogues politiques » initiées par le CODESRIA, les participants à cette rencontre ont appliqué un certain nombre de règles indispensables au succès d’une telle entreprise. Une distanciation avec l’événementiel qui passe par un questionnement approfondi sur les causes de l’effondrement annoncé du modèle ivoirien; le sens historique des choses est appelé pour examiner l’enchaînement et l’interaction des faits dont il faut, à chaque fois, statuer sur le poids historique dans la direction tragique de la dynamique sociale. En compl ément à cette double orientation, les participants, des chercheurs familiers du« terrain ivoirien » et des personnalités politiques, syndicales et de la société civile, ont permis des discussions pertinentes et passionnées parce que souvent nourries par l’expérience. Était également présente une volonté de sortir de cette crise grâce à des actions éclairées par une compréhension de ce bouleversement social dramatique . Se sont confrontés autant de points de vue sur l’interprétation de l’histoire 2 Frontières de la citoyenneté et violence politique en Côte d'Ivoire locale, que sur le sens et les contours structurels de la communauté sociale ivoirienne que l’actualité n’a fait que révéler. Bien qu’il ne soit pas possible de retranscrire de manière exhaustive la richesse de ces débats, cette richesse apparaît cependant dans les approfondissements réalisés par les contributeurs et que reflètent fidèlement les textes présentés dans ce volume. En cherchant les origines sociales de l’irruption de cette déchirure sociale et politique, les auteurs du volume partent tous d’une question centrale: de quelle manière le poids du mode de formation de la société ivoirienne moderne intervient-il sur les modalités des actions individuelles et des regroupements collectifs actuels? Cette rencontre a été aussi l’occasion d’une réflexion collective sur le rôle des sciences sociales dans la lecture de l’évolution des sociétés africaines contemporaines et dans l’identification des possibilités d’interventions correctrices La fracture brutale et violente qu’a connue la formation sociale ivoirienne pose de nouveau, de manière cruciale, la question générale des identités collectives et dévoile les enjeux liés au caractère inachevé de l’entreprise de construction des« États-nations » en Afrique. Les processus de formation des identités collectives ont été profondément marqués par le partage colonial du continent et par sa mise sous contrôle par les puissances extérieures qui s’en est suivie. Depuis cette confrontation historique, la référence sociale principale est désormais un cadre territorial, dit « national » depuis les indépendances acquises dans les années soixante, qui correspondrait plus ou moins à l’espace au sein duquel se fabrique l’État moderne africain. Malgré la force de cet encadrement politique,2 la nouvelle communauté,« le pays », reste de toute évidence hétérogène sur le triple plan politique, social et culturel. L’action politique et administrative de l’État servant à cimenter cette « nation », à constituer le cadre légal où se déploient des regroupements politiques, à imposer à tous la langue de l’ancienne puissance coloniale et enfin à promouvoir le discours « patriotique » qui légitime la nouvelle instance centrale et des élites qui l’animent. Sur la marge de l’idéologie consensuelle, adoptée par le régime du président Houphouët-Boigny, émergent des discours revendicateurs essentiellement centr és sur l’exigence...

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