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10 Les associations urbaines et le pouvoir local dans les quartiers populaires Salimata Wade Cette étude tente de lire et de réinterpréter la dynamique associative des cités africaines comme un facteur qui structure et organise les relations entre les acteurs des quartiers populaires et leur environnement. Il s’agit de présenter en quoi et comment les associations sont ou deviennent des espaces de pouvoir local. Il s’agit également de réfléchir sur les conditions de leur qualification pour devenir de nouveaux lieux d’expression de revendications urbaines, de réinvention de modèles de citoyenneté active — à travers l’apprentissage d’une sorte de syndicalisme social peut-être typiquement citadin (Borja 1975). L’évolution des contextes nationaux de nombreux pays africains pendant les années 1990 et, plus indirectement, celle de l’environnement politique mondial, ont fait émerger des opportunités inédites de participation populaire et institutionnelle au développement local. L’observation des changements de tous ordres qui en ont découlé nous a conduit à penser que les anciennes politiques étatiques de prise en charge des problèmes de développement les plus primaires (services de base) seraient plus vraisemblablement relayées par la montée des initiatives populaires de type informel et collectif que par le développement immédiat et massif d’un secteur privé moderne, structuré selon un modèle libéral occidental — du genre qu’envisagent les Programmes d’ajustement structurel (PAS). Dans le contexte de la décennie écoulée, on annonçait l’imminence d’une domination totale du modèle libéral de développement économique, résultant d’un système politique devenu unipolaire à l’échelle de la planète. Or, des modèles alternatifs de production économique tendent à se mettre en place, par exemple en Afrique de l’Ouest, qui privilégient l’entreprise de type communautaire. 298 Études africaines de géographie par le bas Notre recherche est exclusivement dédiée aux associations populaires urbaines , qui sont véritablement différentes des associations de type plus élitaire, tant dans leurs préoccupations, leurs motivations, leurs objectifs, que leurs moyens d’intervention sur la scène publique. Notre postulat est que ces associations constituent des cadres de création et de diffusion de nouveaux registres et règles de solidarité relatifs à de nouveaux domaines d’intervention communautaire. Aux cadets sociaux et aux groupes marginalisés, elles procurent des opportunit és d’intégration socio-économique et des expériences de prise de responsabilité — qui leur valent la reconnaissance de compétences socialement gratifiantes. Elles favorisent l’émergence de l’Individu, par une émancipation tout à la fois économique, morale et politique, tout en prolongeant l’« ancestrale tradition » des initiatives communautaires. À la masse des (néo-)citadins africains, les associations des quartiers les plus défavorisés offrent des espaces de revendication et d’expérimentation sociale. Jusque-là, on a plutôt voulu croire les associations populaires cantonnées dans des actions temporaires ou saisonnières, de portée anodine, le plus souvent à visée socioculturelle (sport, divertissement, activités confessionnelles) et dans la génération de — petits — revenus (petit commerce, activités faiblement rémun érées). Autrement dit, peu de gens supposent que les associations populaires urbaines pourraient être en mesure de figurer parmi les nouvelles forces organisées capables de participer à l’exercice démocratique du pouvoir dans la Cité. Il y a une pointe de provocation à résumer ainsi nos hypothèses de travail et nos premières conclusions. Il n’en reste pas moins que dans un futur proche, les effets de l’amplification des mouvements associatifs populaires pourraient prendre de court beaucoup de monde, y compris ceux qui en sont les principaux acteurs. Pour l’heure, eux-mêmes ne paraissent pas conscients de la force potentielle du mouvement qu’ils animent.1 Éclairer cette force potentielle requiert de commencer par dresser un état des lieux des dynamiques associatives. Dans un second temps, nous examinerons les rapports susceptibles d’exister entre les associations populaires et le développement d’un processus de formation de cultures urbaines et d’exercice de (nouveaux) pouvoirs locaux, dans une Afrique en quête d’identité et de mod èles sociaux, culturels, politiques et économiques plus démocratiques et mieux adaptés aux aspirations d’un nombre croissant d’individus et de communautés. Une méthode expérimentale pour un travail exploratoire La vérification de notre postulat de recherche s...

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