In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

5 CHAPITRE LACOMMUNICATION SENSIBLE Nouvelle discipline de communication organisationnelle THIERRY LIBAERT [18.223.0.53] Project MUSE (2024-04-24 11:09 GMT) La communication sensible 91 91 Si l’on peut retrouver l’expression «communication sensible» dans les années 1980 et 1990, c’est véritablement à partir des années 2000 et de la création de l’Observatoire international des crises que le terme sera formellement reconnu. Son utilisation est toutefois multiple et prête parfois à confusion. C’est la raison pour laquelle nous avons souhaité poser quelques bases supplémentaires à cette nouvelle discipline (Libaert, 2008, 2009a). 1 L’ORIGINE DE L’IDÉE DE LA COMMUNICATION SENSIBLE L’origine de l’idée de la communication sensible repose sur trois observations. 1 1 L’obsolescence des principes de base de la communication de crise La communication de crise a connu quatre étapes. La première a duré jusqu’au début du XX e siècle, où régnaient les explications par la punition divine ou le principe de fatalité (Walter, 2008). Le règne de la gestion de crise apparaît en France dans les années 1980, notamment sous l’impulsion de Patrick Lagadec. Vint l’âge d’or de la communication de crise, dans les années 1990. Bien qu’il apparaisse impossible de dater avec précision le tournant, il semble qu’une nouvelle phase, celle de la communication sensible, est apparue au début du XXI e siècle pour s’imposer actuellement. Cette nouvelle étape s’est développ ée avec le constat que la notion même de crise avait évolué; devenue«mutante et protéiforme» (Libaert et Roux-Dufort, 2005), elle se montrait irréductible aux modèles explicatifs traditionnels. La crise devenait imprévisible (Libaert, 2009b), en recomposition permanente. En outre, l’explosion de la communication, notamment sous l’effet de la généralisation du numérique, rendait caducs les principes de maîtrise de l’information. L’approche classique basée sur le respect des grands principes volait en éclats. Il ne suffisait plus d’identifier les crises potentielles, de les classer, de les prioriser, d’organiser nos relations, de préparer nos messages et d’effectuer quelques exercices de simulation ou autre media training. Une réalité plus complexe s’est mise en place (Gilpin et Murphy, 2008, p. 51), moins centrée sur le mode de l’organisation et nécessitant une démarche vraisemblablement plus culturelle que technique. Communication et grands projets 92 Communication et grands projets 92 1 2 La porosité de disciplines connexes Aux frontières de la communication de crise se situent plusieurs disciplines entre lesquelles les interactions apparaissent de plus en plus fortes. C’est notamment le cas de la communication d’acceptabilité. Définie en 1996 comme celle qui s’effectue en accompagnement d’un projet d’implantation industriel ou équipementier ayant un impact environnemental majeur (Libaert, 1996), cette vision est apparue rapidement trop étroite puisque les oppositions aux implantations ont débordé le cadre technique pour se généraliser à tout type d’implantation, notamment dans le domaine social, à l’exemple des problèmes d’acceptabilité du logement social. La problématique de l’acceptabilit é territoriale a fortement évolué en raison de son caractère désormais systématique, de l’explosion des médiatisations afférentes, de l’évolution des modalités de conflit, du recours automatique à la judiciarisation, de l’évolution de la notion d’intérêt général qui dominait le registre des valeurs de ce type de projets. Liée directement à la communication d’acceptabilité, la communication sur des thèmes sensibles peut n’en apparaître qu’une variante non territoriale. Les liens sont évidents entre les contestations thématiques et les contestations locales, qu’il s’agisse de la problématique des OGM, du nucléaire ou des gaz de schiste. Les problématiques peuvent toutefois être plus diffuses, non territorialisées et s’attacher à des thèmes à fort contenu polémique (la production d’armement, par exemple). La communication sur le risque tangente également la communication de crise, avec laquelle elle tend parfois à se confondre lorsqu’elle n’en est pas considérée comme un simple prélude, comme si le risque n’était que la phase préparatoire à la crise. Ce domaine a également fortement évolué sous l’effet de la responsabilité sociale d’entreprise et plus particulièrement du principe de précaution. Ces...

Share