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Chapitre 5 L’indoor, l’underdoor et l’aroundoor Les sports de nature envahissent la ville Pascal Mao, Jean Corneloup et Philippe Bourdeau Les sports de nature ont bénéficié tout au long de leur histoire de dénominations changeantes. Dienot et Theiller (1999) montrent comment ces activités ont successivement été qualifiées de pratiques «au bon air» durant la deuxième moitié du xixe siècle, puis «au grand air», «de plein air», «de pleine nature», puis plus simplement «de nature» aujourd’hui. Le dénominateur commun de ces différentes pratiques est qu’elles se déroulent dans des espaces dits naturels et qu’elles constituent des moyens privilégiés de découverte de l’environnement. Mais l’observation des pratiques contemporaines montre une très large diversification des espaces supports. L’escalade par exemple se pratique aussi bien dans des gymnases sur des structures artificielles (SAE), 82 Les nouvelles territorialités du sport dans la ville sur des viaducs ferroviaires, sur des escarpements rocheux aménagés ou encore, pour des activités bien plus aventureuses, sur des big walls (grandes parois) dans des massifs montagnards lointains, pour reprendre la terminologie anglo-saxonne. En France, en 2005, plus de 2000 sites naturels de pratique sont recensés ainsi que plus de 2000 SAE! De la même façon, la randonnée se pratique aussi bien dans les espaces urbains que dans les parcs publics, dans les réseaux de sentiers de grande randonnée traversant les campagnes et zones de montagnes, ou encore dans les confins, comme l’illustre l’engouement pour des grandes randonnées (trekkings) plus ou moins aventureuses dans des destinations éloignées. Parmi les meilleures ventes des topoguides de la Fédération française de randonnée pédestre (FFRP), on retrouve les très classiques Tour du Mont-Blanc ou la traversée de la Corse par le GR 20, mais aussi les randonnées au cœur et aux alentours des grandes agglomérations, Paris en premier lieu. Le même type d’exemple pourrait être développé pour l’ensemble des autres activités de nature. Cette dynamique de diversification des espaces supports s’est développée au cours des années 1980. Elle est marquée par un double processus de déterritorialisation ou d’artificialisation qui illustre la progressive affirmation de nouveaux lieux récréatifs au centre ou à proximité des villes. Il s’agit dès lors de se questionner sur la «nature de la nature», pour reprendre le titre de l’ouvrage d’Edgar Morin (1977). Cette contribution se propose d’analyser ces nouvelles formes d’usages, de représentations et d’aménagement des espaces récréatifs de nature dans ou à proximité des villes. Ceux-ci seront ci-après qualifiés de formes géosportives et déclinés sous les appellations d’indoor, d’underdoor et d’aroundoor. D’un point de vue sociospatial, de multiples logiques sont à l’œuvre, comme la construction de parcs de loisirs, la reconquête récréative des espaces urbains et publics, un processus de périurbanisation sportive. S’agit-il d’une disneylandisation (Brunel, 2006) comme création ex nihilo d’univers naturels issus de nos imaginaires, sorte d’artefact d’une nature idéalisée, ou bien d’une nouvelle façon de penser et d’organiser les relations entre sports, ville et nature façonnant une nouvelle urbanité récréative? 5.1. Une diversification des formes géosportives de lieux récréatifs de nature Une analyse géographique des sports de nature (Mao, 2003 ; Augustin, Bourdeau et Ravenel, 2008) montre l’existence de deux organisations socio­ spatiales distinctes des espaces supports d’activités (figure 5.1). [18.191.195.110] Project MUSE (2024-04-25 01:22 GMT) L’indoor, l’underdoor et l’aroundoor 83 La première s’est progressivement affirmée durant la seconde moitié du xixe siècle jusqu’au début des années 1980. Les sports de nature se sont traditionnellement développés dans des milieux dits naturels, plus ou moins aménagés et régulés. Les espaces sportifs pensés sur une logique d’altérité (Bourdeau, 2003) opposaient l’Ici, la ville, l’espace contraint, aux espaces de l’Ailleurs, la campagne, la montagne, comme lieux aussi bien de récréation que de recréation. Cette dialectique participe à ce que­ Bourguet, Moreux...

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