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8. La démarche de vieillissement actif : une innovation sociale avec empowerment ou responsabilisation des individus ?
- Presses de l'Université du Québec
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8 LA DÉMARCHE DE VIEILLISSEMENT ACTIF Une innovation sociale avec empowerment ou responsabilisation des individus? Juliette Rochman et Diane-Gabrielle Tremblay Le vieillissement de la population est un phénomène planétaire.Les Nations Unies estiment qu’en 2050, pour la première fois dans l’histoire de l’humanit é, le nombre de personnes de plus de 60 ans dépassera le nombre de jeunes de moins de 15 ans; le phénomène du vieillissement de la population se déclinera autant dans l’absolu (augmentation du nombre des aînés) que de façon relative (augmentation de la part des aînés dans la population). Déjà, de 1986 à 2007, la population âgée de 65 ans ou plus était passée de 658 millions à 1,106 milliard de personnes, soit une augmentation de 68%; alors qu’elle ne représentait que 5% de la population mondiale durant la première moitié du XXe siècle, voilà qu’elle correspond en 2011 à plus de 16% de la population totale du globe. Selon un classement des différents pays réalisé par les Nations Unies sur la base de l’âge médian, le 140 Pourunenouvellemondialisation•Ledéfid’innover Japon se placerait en première position relativement au vieillissement de sa population (âge médian de 41,3 ans), suivi de l’Italie, de la Suisse et de l’Allemagne. Le Canada se situerait au 27e rang et le Québec, au 16e rang. Au-delà de ses effets démographiques et financiers (cf.Tremblay, 2010, 2007), le vieillissement représente plusieurs enjeux pour les gouvernements comme pour les municipalités (notamment celles du Québec). Parmi ces enjeux, deux questions paraissent fondamentales. D’une part vient le problème de l’adaptation des services et des milieux de vie aux besoins des aînés: accès à l’information, offre d’activités, maintien à domicile, garantie de la qualité du logement, favorisation de l’autonomie et lutte contre l’isolement , soutien à l’encadrement des proches aidants, adéquation des soins de santé offerts aux aînés (y compris la médication). La satisfaction de ces besoins nécessite des efforts à différents niveaux et pour différentes catégories d’acteurs. Se pose donc de manière de plus en plus prégnante à l’échelle des pouvoirs publics, locaux en particulier, la question de la préparation des institutions face à l’évolution de ces besoins. Au Québec, le gouvernement est en effet concerné par cette question (à l’échelon provincial ), tout comme le sont les municipalités, les municipalités régionales de comté (MRC), les conférences régionales des élus (CRÉ) (à l’échelon municipal ou régional) et les prestataires de services aux aînés (au niveau local). Par ailleurs, le vieillissement de la population oblige également à veiller à l’intégration des aînés, ainsi qu’à la reconnaissance et au soutien de leur apport à la société, sachant que celui-ci est considérable dans de nombreux domaines tels le bénévolat, l’aide et l’assistance, la contribution fiscale et la participation au marché du travail. À ce titre, l’exemple canadien et québécois en particulier est révélateur1 . À la fois en filigrane et en surimposition de ces enjeux, vient s’ajouter la question du dépassement (et si possible de l’élimination) des préjugés liés à l’âge et de leurs effets. La recherche sur les stéréotypes et les attitudes envers les personnes âgées débute au cours des années 1950 avec, entre autres, les travaux de Tuckman et Lorge (1953). Pendant les années 1970, l’image sociale de la vieillesse devient tant un objet de recherche scientifique qu’un sujet de préoccupation sociale, d’abord aux États-Unis, puis en Europe. Considérant l’existence – et la persistance – de stéréotypes négatifs de la vieillesse, ainsi que les discriminations induites par ces stéréotypes , Robert Butler cristallise en 1969 un nouveau champ de recherche 1. Au Canada, en 2003, 39% des personnes âgées de 65 à 74 ans effectuaient en moyenne 250 heures de bénévolat par année; le tiers des personnes âgées de 70 ans ou plus apportaient un soutien financier à leurs petits-enfants; 22% des personnes âgées de 60 à 69 ans s’occupaient d’une personne en perte d’autonomie (Ipsos...