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Préface Juliet CORBIN, D.N.Sc.1 Je suis très honorée d’avoir été invitée à écrire la préface de ce livre qui apporte une contribution de taille au corpus croissant de publications sur la méthodologie de la théorisation enracinée (MTE). Ce livre présente le grand intérêt de sortir la MTE d’une vision abstraite la limitant à un ensemble d’idées et de procédures, pour l’amener dans une vision vivante en l’appliquant à des projets de recherche concrets. Aux chercheurs qui envisagent d’utiliser cette méthodologie ou à ceux qui ont déjà entamé une recherche avec la MTE, ce livre explique certains problèmes qui se posent avant et pendant la démarche de théorisation enracinée, tout en dispensant des conseils pratiques sur la façon de les résoudre. La méthodologie de la théorisation enracinée existe depuis plus de quarantecinq ans (Glaser et Strauss, 1967). Au cours de cette période, des chercheurs du monde entier l’ont appliquée avec succès à leur démarche de recherche sur des sujets divers et dans différentes perspectives disciplinaires. Malgré l’usage répandu de cette méthodologie et malgré le riche corpus de connaissances qu’elle a généré, ce livre montre qu’il se trouve encore des personnes pour mettre sa pertinence et sa légitimité en doute. Qu’est-ce que la méthodologie de la théorisation enracinée? Est-elle une forme de recherche légitime? Constitue-t-elle un choix approprié pour le chercheur novice? Je répondrai brièvement à chacune de ces questions. Qu’est-ce que la méthodologie de la théorisation enracinée? La MTE est une approche inductive dont la finalité est de générer des théories. Elle vise un résultat bien défini et propose un ensemble de procédures pour y parvenir. 1. Cette préface a été traduite par Elisa Line Montigny, traductrice professionnelle, et par Jason Luckerhoff et François Guillemette. VIII Méthodologie de la théorisation enracinée Voilà une explication bien succincte, mais ceux qui désirent en connaître davantage trouveront les réponses dans ce livre. Passons maintenant à la deuxième question: la MTE est-elle une forme de recherche légitime? La notion de construction de théories n’est pas nouvelle. Ce qui est nouveau, c’est la controverse que cette méthodologie suscite. D’aucuns lui reprochent son manque de structure et soutiennent qu’elle n’a pas sa place en recherche, d’autres l’accusent d’être trop structurée et trop postpositiviste pour être légitime, et soulignent son manque d’à-propos dans sa structure actuelle. Toute méthode fait l’objet de critiques. Mais les critiques les plus sévères formulées à l’endroit de la MTE proviennent du milieu de la recherche quantitative. Il ne fait aucun doute que l’approche méthodologique proposée par la MTE va à l’encontre de la vision dominante de la science, celle qui est fondée sur le raisonnement logico-déductif. Le modèle logico-déductif de la science consiste à chercher la vérité en vérifiant des hypothèses au moyen d’un cadre théorique préexistant et de l’analyse statistique. Le but de la recherche est d’arriver à des conclusions généralisables à d’autres populations . Cette approche scientifique à l’origine de nombreuses découvertes s’est taillée une place de choix dans le monde de la recherche. En revanche, la MTE a pour principal objectif de générer des théories; pas n’importe quelles théories, mais bien des théories «enracinées» dans les données de terrain et en croissance à partir de celles-ci. La démarche comporte donc un volet de collecte de données, de même qu’un ensemble de procédures générales pour en guider l’application, comme c’est le cas pour toute forme de recherche. Là où l’approche diffère de celle qu’utilisent les types de recherche plus conventionnelles, c’est qu’elle repose sur un postulat selon lequel il n’existe pas de vérité unique, en ce sens qu’il n’y a pas qu’une seule façon de voir le monde. Plutôt, il existe de multiples vérités selon les définitions que font...

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