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C H A P I T R E 8 CONFLITS SOCIAUX ET ENVIRONNEMENTAUX DANS ET SUR LA VILLE Le cas de Montréal RICHARD MORIN Professeur, Département d’études urbaines et touristiques, Université du Québec à Montréal, Montréal, Canada JEAN-MARC FONTAN Professeur, Département de sociologie, Université du Québec à Montréal, Montréal, Canada LES RESTRUCTURATIONS ÉCONOMIQUES ET LES NOUVELLES FORMES DE régulation étatique qui accompagnent le processus de mondialisation, de même que le phénomène de métropolisation qui prend de plus en plus d’importance, ont eu des impacts considérables sur les agglomérations urbaines au cours des dernières décennies, notamment en matière de justice sociale et d’environnement. Ces impacts ont fait l’objet d’actions collectives qui ont contribué à les mettre au jour. Nous distinguons deux types d’actions collectives en milieu urbain: les actions qui se manifestent dans la ville en lien avec des problèmes généraux de société comme le chômage et les gaz à effets de serre, la ville représentant alors une arène de débat public; et les actions qui portent sur la ville, c’est-à-dire sur le cadre de vie urbain, sur le logement, sur les équipements et services urbains, sur le développement des quartiers ainsi que sur la gestion municipale, la ville constituant alors l’objet de ces actions. Nous nous sommes intéressés aux actions collectives conflictuelles autour des enjeux de justice sociale et d’environnement depuis le début des années 1980 à Montréal, ces années correspondant à des changements marquants sur les plans économique, politique et territorial. Nous avons cherché à répondre aux questions suivantes. Quels sont ces enjeux? Quels sont ceux qui ont fait l’objet d’actions dans la ville et ceux, d’actions sur la ville? Qui sont les protestataires? 144 Métropoles des Amériques en mutation Qui sont les adversaires? Quels sont les répertoires d’actions? Quels sont les effets de ces actions? Pour répondre à ces questions, nous nous sommes principalement appuyés sur le dépouillement des articles de trois journaux publiés quotidiennement à Montréal, La Presse, Le Devoir et The Gazette, sur les archives de la ville de Montréal et sur d’autres recherches menées sur le sujet1. Ce texte comprend quatre parties. Premièrement, nous exposons nos principaux repères conceptuels. Deuxièmement, nous dressons un portrait du contexte des années 1980, 1990 et 2000. Troisièmement, nous répondons aux questions posées plus haut en ce qui concerne les enjeux de justice sociale, puis, quatrièmement , les enjeux environnementaux. En conclusion, nous faisons ressortir les faits saillants de nos analyses. 1. Repères théoriques: la sociologie des mouvements sociaux C’est en nous inspirant de la sociologie des mouvements sociaux que nous avons principalement effectué nos analyses, mouvements sociaux que l’on peut définir comme des actions collectives conflictuelles menées contre un adversaire dominant et proposant des valeurs alternatives (Touraine, 1978) ou comme un «agir ensemble intentionnel» qui véhicule des valeurs qui s’opposent aux valeurs dominantes et qui a pour objectif l’établissement d’un «nouvel ordre de vie» (Neveu, 2005, p. 9-10). Comme nous venons de le mentionner, nous avons distingué, d’une part, les mouvements sociaux dans la ville, ceux qui interviennent sur des enjeux de société en général comme la pauvreté et les pluies acides, la ville ne constituant alors qu’une arène de débats publics; d’autre part, les mouvements sur la ville, ceux qui concernent le logement, l’aménagement urbain, les services de proximité, les infrastructures urbaines, la gestion municipale et la démocratie locale, la ville faisant alors directement l’objet des conflits. Ce deuxième type de mouvements correspond à ce qu’on entend généralement par mouvements urbains (Hamel, 2008). Toutefois, il importe de signaler que la frontière entre les actions sur la ville et les actions dans la ville n’est pas étanche, des protestations sur des enjeux locaux pouvant aussi soulever des enjeux plus globaux, le manque de logements sociaux dans un quartier renvoyant par exemple aux politiques nationales d’habitation . À l’inverse, des conflits sur des enjeux généraux de société, comme la pollution par l’automobile, peuvent déboucher sur des revendications en faveur de l’aménagement de pistes cyclables en milieu...

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