In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Chapitre 7 Les conditions d’émergence du changement transformationnel Catherine Barnabé Qu’on le qualifie de non linaire ou encore d’émergent, le changement qui transforme résulte nécessairement d’un apprentissage (Kourilsky-­ Belliard, 1999). Le rôle de l’intervenant qui accompagne les personnes et les groupes lors de ces processus de changement consiste à mettre en place les conditions qui favorisent cet apprentissage. L’étude réalisée par Barnabé (2010) auprès d’une PME de la ville de Québec sous le mode de la recherche-intervention a permis de cerner des conditions tant contextuelles, organisationnelles que d’accompagnement qui favorisent l’émergence du changement transformationnel. Pour le lecteur, il s’agit d’appréhender ces propositions en tant que principes qui peuvent faciliter l’accompagnement des personnes et des groupes lors de processus de changement organisationnel de type transformationnel. 198 Théorie U – Changement émergent et innovation 1 La mise en contexte En ce début de xxie siècle, la capacité des organisations à se transformer est une préoccupation prééminente, puisque c’est elle qui semble régir leur possibilité de survie. Les dernières décennies nous ont montré que les processus de changement de type linéaire auxquels font appel les organisations, comme la restructuration, la réduction d’effectifs et la qua­ lité totale, ne leur permettaient plus de naviguer dans cet univers orga­ nisationnel de plus en plus complexe qu’est le nôtre. En effet, comme plusieurs auteurs l’ont indiqué (Bleakley, 1993; Pauchant et al., 1996; Senge et al., 1999; Druhl, Langstaff et Monson, 2001; Capra, 2004), les processus linéaires de changement, souvent issus d’une épistémologie positiviste, n’atteignent plus les résultats escomptés, entraînant par le fait même des conséquences préoccupantes tant sur le plan organisationnel qu’humain. Sur le plan humain, les pratiques linéaires en matière de changement peuvent notamment provoquer chez les travailleurs une détresse psycho­ logique au travail. En effet, au Québec, une étude effectuée en 2003 par l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST) auprès de 3142 personnes issues d’organisations variées1, en est arrivée à la conclusion selon laquelle les changements organisationnels occasionnent dans les entreprises des bouleversements qui peuvent affecter les travailleurs sur le plan psychologique. À l’appui, 43,42% des travailleurs participant à l’étude ont présenté un niveau de détresse psychologique élevé au travail (Légaré et al. cités dans Brun et al., 2003). Selon cette même étude, ce niveau de détresse psychologique élevé au travail est attribuable, notamment, aux pratiques de gestion du changement qui encouragent la surcharge quantitative, le peu de reconnaissance de l’entou­ rage, les relations pauvres avec le supérieur, le manque de ­ circulation de l’information et la faible participation aux décisions. Sur le plan organisationnel, inutile de rappeler les effets pervers entraînés par des pratiques de gestion inadéquates en matière de chan­ gement. En effet, si la manière de gérer le changement dans les organi­ sations est source de détresse psychologique pour les travailleurs, elle augmente, par le fait même, le taux d’absentéisme et de roulement au travail, entraînant ainsi une diminution de la performance et de la pro­ ductivité. Selon le rapport effectué par l’IRSST, la manière dont le chan­ gement est géré dans les organisations entraîne une compétition sans limites qui génère un sentiment de harcèlement généralisé au travail à 1. La recherche a été effectuée auprès de 3142 personnes travaillant au sein d’un établissement d’enseignement supérieur, d’une industrie du secteur métallurgique, d’un centre hospitalier et d’une pépinière et a été réalisée par Brun et al. (2003). [18.220.160.216] Project MUSE (2024-04-26 12:53 GMT) Les conditions d’émergence du changement transformationnel 199 un point tel que l’épuisement professionnel, le stress et la souffrance au travail semblent banalisés aujourd’hui (De Gaulejac, 2005). Selon Aktouf (1992) et De Gaulejac (2005), ce qui ressort clairement de ces constats, c’est un appel persistant à mettre l’être humain au centre des pratiques organisationnelles. Ce sont ces constats qui nous ont amenée à rechercher d’autres avenues en matière de changement organisationnel et à explorer...

Share