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I. Pluta Anatomia electronica ou le théâtre du corps et du média La scène multimédia est imprégnée par les mutations technologiques et devient un reflet fidèle du réel interférant avec le virtuel. Le corps s’y présente comme point central déjà en dehors du champ artistique. Il est le thème de nombreux débats théoriques tant sur le plan anthropologique interrogeant le paradigme posthumain, que sociologique analysant le phénomène de cybercommunautés. Le dualisme cartésien du corps et de l’esprit se trouve redéfini à travers les possibilit és données par le cyberespace qui mènent vers un élargissement du corps physique et une redéfinition de la chair humaine. Dans ce contexte, le travail de Stelarc, performeur du body art, est emblématique et influence considérablement les artistes œuvrant dans le même champ de recherche artistique. En effet, dès les années 1980, Stelarc constate que le corps de l’homme est obsolète et se trouverait aux limites non seulement de sa physiologie mais également de la pensée humaniste . De cette manière, il rejoint la lignée des théoriciens du posthumain1 . Stelarc présente une perspective extrême de l’être humain et travaille à un élargissement du corps, convaincu que l’idée de l’interface avec l’appareil technologique appellera une amélioration de la procréation. Artistiquement, cela se traduit dans les œuvres de l’artiste en ondes acoustiques et visuelles (renforcement des battements du cœur, des ondes du cerveau, des signaux musculaires) auxquelles il soumet son corps ainsi qu’en prothèses, comme le bras artificiel qu’il se greffe et qui interagit avec ses muscles2 . Il s’agit, chez Stelarc, d’une véritable interrogation du corps au sens propre du terme en le soumettant à l’examen technologique, en le transformant • 1 – Stelarc, « Beyond the Body : Amplified Body, Laser Eyes, and Third Hand », in Stiles K., Selz P. (dir.), Theories and documents of contemporary art : a sourcebook of artist’s writings, Berkeley, University of California Press, 1966, p. 427-430. • 2 – Media Art Biennale WRO 97, catalogue, 30 avril-4 mai 1997, Wroclaw, Open Studio, 1997, p. 117-127. I z a b e l l a P l u t a - 104 de telle manière qu’il puisse être élargi virtuellement à travers les réseaux informatiques3 . Ce faisant, Stelarc confirme les prévisions de Marshall McLuhan qui, en 1960 déjà, voyait dans le développement des moyens de communications le prolongement technologique de l’homme4 . Si l’on tentait rapidement une typologie, il serait possible de dire que les spectacles de nouveaux médias opèrent, entre autres, selon deux stratégies créatives au moins concernant le corps. D’une part, ils passent par la théâtralisation du corps robotique et virtuel comme chez Stelarc et Marcel-lí Antúnez Roca. D’autre part, ils mettent en jeu une corporalité composite comme celle que propose Elisabeth LeCompte, par exemple. Stelarc et Marcel-lí Antúnez Roca, sont des artistes qui s’inscrivent dans ce que nous pourrions appeler le « théâtre du cyborg », qui explore la science de la cybernétique en tant que méthode de création. Ce faisant, ils interrogent le corps de chair et d’os et ses rapports avec le cyberespace . Antúnez Roca utilise un dispositif complexe dont fait partie intégrante un exosquelette. Ce dernier est un costume équipé de capteurs et connecté à un appareillage informatique. Dans la performance Protomembrana, entre autres, l’artiste le porte lui-même, le manipule, et lui permet d’interagir avec l’image. De son côté, Elisabeth LeCompte explore en revanche les multiples techniques de visualisation et de sonorisation. Dans The Hairy Ape et Hamlet, par exemple, elle intègre des images émises et des captations en temps réel ainsi que les effets spéciaux de nature sonore. Elle construit dans ses mises en scène des relations variées entre le corps de l’interprète et les projections vidéo qui les transposent, dévoilant la complexité de la corporalité virtualisée, médiatisée, assujettie, dispersée, à mi-chemin entre le théâtral, le virtuel et le réel. Ces créations rendent explicites ce que l’extra-scénique nous garantit : une nouvelle anatomie en fusion avec le technologique, que nous nommerons anatomie électronique. Dans les pages...

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